Nos déchets : matières à recyclage et... à réflexions.

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Que l'année soit durable !

La socièté « Eco-Emballage » qui tire bénéfice de nos déchets fait du prosélytisme. Elle nous engage à les trier. Dieu sait que nous avons fort à faire en cette période où l'on est censé tout oublié, jouir du moment présent et surtout consommer. Gagner plus pour consommer plus, l'aurait-on déjà oublié ?

Soyons donc éco-responsable ! Ainsi, lorsque nous viderons la dernière bouteille de champagne (composée déjà de 75% de verre recyclé), n'oublions pas de la déposer dans le bac vert… Quant à la boîte en fer blanc qui contenait notre foie gras, elle est recyclable à l'infini, à condition qu'elle trouve le bac adéquat, de couleur jaune celui-là. Idem pour la boîte de marron et pour tous les récipients en métal. On les retrouvera dans nos appareils électroménagers par exemple. On nous dit qu'un emballage fabriqué à partir d’acier recyclé économise l’équivalent de 1,5 fois son poids en CO2. Si vous nous le dites…

C'est maintenant l'heure des cadeaux. Une gabegie d'emballages en papier, en carton et en une gamme étendue de plastiques. On s'énerve sur les blisters et l'on s'y coupe. On éparpille les chips en polystyrène un peu partout, merci pour la ménagère qui demain retrouvera son plumeau et son aspirateur, le tout nouveau, celui qu'on vient justement de lui offrir !

Tout les cycles ont un début et une fin. Le carton n'a que sept vies et, transformé en serviette à papier, il finira de sa belle mort. Toutes ses informations sur le recyclage restent un peu mystérieuses. Il nous faut croire ces spécialistes sur parole. Autre élément porté à notre connaissance, le fait que « 87 % de Français déclaraient que le tri est le premier geste qu’ils peuvent faire en faveur de l’environnement. » On nous affirme aussi qu'aujourd'hui, grâce à l'engagement collectif des entreprises, des collectivités, des citoyens et des professionnels du recyclage, « environ 63% des emballages ménagers sont recyclés en France. » Autre nouvelle, bonne : « une famille de 4 personnes qui trie ses emballages, permet d’éviter l’émission de 115 kg de CO2 chaque année, soit 717 km en voiture et d’économiser 688 kWh, soit 4 590 h de télévision. » Cela reste un peu abstrait même si les 4 590 heures de TV ont de quoi impressionner le vulgum pecus. Bon public, nous ne demandons qu’à croire, incapables de vérifier ces chiffres et ces sondages. Restons malgré tout prudents et un brin sceptiques… car autour de nous, la situation ne semble pas aussi réjouissante. De nombreux déchets traînent dans nos rues, les magasins continuent à nous fournir des millions sacs en plastiques (dans les rayons alimentaires par exemple), les décharges sauvages sont visibles un peu partout bien qu’il y en ai peu dans le 16ème… N’en jetez plus la cour est pleine ! D’ailleurs, à propos de cour, lorsqu’il s’agit d’évacuer et de stocker les déchets, les Anglais connaissent la chanson : not in my backyard, please (pas dans ma cour, SVP) !

Le tri qu’on nous encourage à faire au niveau individuel n'est pas toujours une opération évidente. Certains matériaux que l'on pensait recyclables ne le sont pas. Il y a plastiques et plastiques, de quoi s'y perdre. On ne sait jamais s'il faut garder les bouchons ou pas, si tous les papiers peuvent être déposés, si tous les contenants en verre sont recyclables. Si l'on se trompe de conteneur et que l'on y met des produits non recyclables, on risque en effet de réduire à néant toute l'opération. Plusieurs enquêteurs, en suivant des bennes, ont démontré que leur destination n'était pas celle qu'on attendait, qu'elles ne rejoignaient pas la déchetterie et se retrouvaient dans le circuit normal. Interrogés, les responsables ont fait part de la difficulté de recycler des produits mal triés. Point à la ligne.

Peu de gens semblent concernés par le réel problème des déchets et leur traitement en amont. Nous produisions beaucoup moins de déchets, il y a seulement 40 ans. Il est vrai que nous étions aux lendemains de deux guerres et que notre société de consommation balbutiait. En quelques années donc, nous avons passé la vitesse supérieure et produit des montagnes de déchets dont nous pourrions très bien nous passer. C’est un choix de société, de société riche dans un monde où les matières premières sont abondantes et peu coûteuses. Aujourd’hui, les données ont changé. Nous sommes moins riches, les matières premières s’épuisent et nous forcent à réviser nos priorités, à envisager d’autres solutions. Les pays pauvres montrent la voie. Chez eux, on recycle tout ou presque et les reportages sur les bidons villes qui poussent sur les décharges en Égypte, au Bangladesh ou aux Indes, sont tristement exemplaires… Faut-il donc devenir pauvres pour recycler ? N’y a-t-il pas d’autres solutions, en amont, pour diminuer notre masse de déchets ? Ne pourrait-on pas envisager de produire par exemple moins de déchets, de se remettre aux bouteilles consignées comme cela se fait dans les pays scandinaves depuis des années ? Trop simple sans doute, à moins qu’il y ait d’autres considérations… économiques ? Car cette industrie de l’emballage procure des emplois, n’est-ce pas, et celles, nouvelle, des industries de récupération et de recyclage aussi (même si le coût énergétique n’est que rarement évoqué et pour cause…). Alors, plus d’emballages, plus d’emplois, la boucle est bouclée, Elkabbach, taisez-vous !