Droits et devoirs, les deux faces d’une même pièce...
Longtemps, on a imposé aux citoyens lambda plus de devoirs que de droits. La roue semble avoir définitivement tournée et nombreux sont maintenant ceux qui exigent d’avoir plus de droits que de devoirs. Pourtant, ne sont-ils pas indissociables ? C’est la question à laquelle, Fernand Dartigues, s’était attaché à répondre. Il avait déposé, en 1997, un projet de « Déclaration des Droits du citoyen ».
ARTICLE 1 - Les hommes ne naissent ni ne demeurent libres et égaux en droits. La Nature qui les fait forts ou faibles, qui leur donne des dispositions physiques, mentales et morales très diverses, ne le veut pas. Ils ne sauraient donc prétendre à l’égalité, ils ne peuvent édifier aucune société sur cette notion irréelle.
Lecteur du texte, Olivier Giscard d’Estaing, à l’époque membre du Conseil économique et social, avait proposé d’amender cet article :
« Les hommes ne naissent ni ne demeurent égaux. La Nature qui les lait forts ou faibles, qui leur donne des dispositions physiques, mentales et morales très diverses est ainsi faite. S'il convient de favoriser l’égalité des droits et des chances, on ne saurait édifier une société sans reconnaître ces différences naturelles. »
ARTICLE 2 - Les hommes et les femmes sont des êtres dont les droits ne sauraient aller sans des devoirs. Il importe qu'ils prennent conscience également des deux : car ils ont à la fois le droit et le devoir de vivre. Ce qui implique, non seulement, le devoir de défendre leurs droits, mais de remplir les obligations de leur état, d'assumer leur tâche correctement, de remplir leur rôle dignement.
ARTICLE 3 - Le fait de vivre en société ne peut aller sans limiter la liberté. Plus grands et plus complexes sont les groupements, plus nombreuses sont les contraintes ; les plus égoïstes doivent tenir compte de l’existence d'autrui, les moins solidaires sont tenus d'admettre une inéluctable solidarité.
ARTICLE 4 - En dehors des devoirs communs à l’espèce vis-à-vis des parents et des enfants, outre le respect des lois fondamentales qui commandent de ne pas tuer, ne pas voler, ne pas tromper, l'homme se doit de penser et d'agir selon sa conscience plutôt que selon son seul intérêt, en évitant, non pas seulement d’enfreindre les lois, mais surtout de ne pas porter préjudice à autrui.
ARTICLE 5 - L'homme doit travailler pour produire, ou pour rendre des services. A défaut de génie créateur, il faut que son activité soit positive et que, d'une façon ou d'une autre, il participe à l’effort général. Sinon, il est un parasite social : un de ceux qui vivent aux crochets d'autrui et par qui rien ne se fut jamais accompli.
ARTICLE 6 - Hommes et femmes ne sont pas ici-bas pour subsister ou s'enrichir. Ni pour réclamer sans cesse de nouveaux avantages et croire que tout leur revient, alors qu'ils ne sont pour rien dans la création des biens dont ils disposent.
ARTICLE 7 - Parmi tous les devoirs de l’homme, il en est un qui semble aller de soi et qui, pourtant, se trouve négligé par un trop grand nombre. Il s'agit du respect de soi-même, de la qualité de sa propre existence que l’on obtient par l'entretien de son corps et de son esprit. Cet effort qui exige une volonté soutenue, permet d'éviter la trop rapide déchéance physique et mentale, dont on peut observer les effets sur tant de civilisés. Une assez grande exigence à l’égard de soi-même relève d'une notion de dignité aussi importante que celle de liberté.
ARTICLE 8 - Les devoirs de l'homme sont au moins aussi nombreux que ses droits. Il lui faut déployer autant d'énergie à s'acquitter des premiers qu'à défendre les seconds. Un homme digne de ce nom s’efforce de donner au moins autant qu'il reçoit. Il ne saurait s'estimer qu'en raison de ce qu'il apporte, en échange de ce qui lui est offert. Cela peut se traduire par une œuvre d 'art, une influence spirituelle, un poème, une recherche scientifique, une action organisatrice... L'important restant pour lui, de donner sa mesure et de montrer sa qualité ; chacun contribuant selon ses moyens à l'essor de l’humanité.
ARTICLE 9 - En définitive, les droits de l’homme auront d'autant plus de chances d'être respectés que ses devoirs seront mieux remplis. Il devient nécessaire que l'on comprenne ceci : il n’y a pas de société durable lorsqu'elle est composée d'un trop grand nombre d'ayants-droits, par rapport à une minorité de citoyens qui remplissent tous leurs devoirs.
ARTICLE 10 - La force ne doit pas primer le droit, mais sans le respect des devoirs, il ne reste plus que le droit de la force car c'est le devoir qui donne un véritable droit et qui permet de vaincre la seule force.
ARTICLE 11 - L'histoire de l’humanité, fournit d'innombrables exemples d'une tendance universellement répandue : celle de l’homme à exploiter l'homme. L'esclavage est depuis longtemps aboli, mais nous n'en avons pas fini avec toutes les formes d'oppression qui consistent, pour les uns à s'arroger tous les droits et ne laisser aux autres que des obligations. Pour ces derniers, le mot devoir prend une signification extrêmement rébarbative, car il correspond à une soumission perpétuelle. On ne saurait admettre que certains humains soient uniquement voués au service de privilégiés. II appartient aux opprimés de lutter avec la dernière énergie, afin de se soustraire à leur condition d'esclave : une fois le but atteint, il leur appartient de ne pas devenir à leur tour des oppresseurs.