Un négationnisme de l’Algérie française…

Catégorie Pieds dans le plat

Les Français ont la mémoire courte et l’Histoire aussi qui ne retient que ce que le politiquement correct du moment lui dicte. Guy Bezzina, natif de Guelma en Algérie, parle même de « négationniste » à propos du destin récent de son pays d’origine.



- photo © Madame Grinderche -


« Le négationnisme consiste en un déni de faits historiques, malgré la présence de preuves flagrantes rapportées par les historiens, et ce à des fins racistes ou politiques. »

L’histoire de l’Algérie française, de sa mise en valeur par les immigrants venus de la France et de l’Europe jusqu’aux temps tragiques qui ont précédé et suivi son indépendance… semble frappée par un négationnisme officiel. Ce négationnisme a la singularité de ne pas « dénier les faits historiques » mais de les taire et de les ignorer. Il a cette autre particularité,  quand il doit évoquer ces 130 ans d’histoire, de ne retenir que la part qui souille et condamne l’œuvre française et ceux qui l’ont réalisée.

Le projet de faire entrer la dépouille de Madame Gisèle Halimi au Panthéon a suscité un intérêt diversement apprécié. Avocate célèbre pour son action en faveur de l’égalité des femmes, elle le fut également pour les fellaghas ennemis de la France et assassins de milliers de soldats, de harkis, de civils français et arabes dans des conditions d’atrocité innommables. Si Madame Halimi, pourquoi pas le Colonel Jeanpierre, mort au combat ou un soldat inconnu tué dans le djebel ?

Madame Halimi a souvent dénoncé la torture pratiquée en Algérie. Les historiens déploient leur talent à dévoiler les pratiques des services spéciaux français mais restent pudiquement discrets sur l’action de la police parallèle des barbouzes et de leurs actes de tortures dans la célèbre villa Le Radjah sur les hauteurs d'Alger… On dénoncera la répression parisienne contre les manifestants pro FLN, mais personne ne commémorera l’horrible massacre de d’El Halia près de Philippeville le 20 août. Sensibilité pour les uns, silence méprisant pour les autres… A la vérité, la France a toujours eu un problème avec son histoire. Patriote aux anniversaires de ses victoires, amnésique et silencieuse à ses défaites.

Pour l’histoire de l’Algérie française, il s’y ajoute la honte d’une lâcheté sans nom et le poids du crime par omission quand elle a abandonné, plus qu’abandonné, livré à leurs bourreaux des milliers d’Algériens massacrés dans leur uniforme de soldat de la France. « Tuez-les, mais tuez-les tous pour qu’il n’en reste pas un pour me le reprocher » aurait dit Charles IX, lors du massacre de la Saint Barthélémy. Grace au courage d’officiers français, il en reste encore de ces rescapés des massacres de juillet 1962 pour brouiller la conscience des Français et le leur rappeler à temps et à contretemps. Alors, on peut comprendre l’amnésie française par le silence étouffant qui couvre cette longue tragédie… Quand elle a canonisé trop vite un prêtre pédophile, l’Église catholique se trouve bien désemparée par un saint trop encombrant. Quand ils ont trop vite érigé des statues à un général coupable d’un génocide par abandon et refus de porter secours à des milliers de harkis en danger de massacre, il est cruel d’avoir à reconnaître qu’il faut brûler ce qu’on a adoré. 

Le négationnisme par l’oubli et le silence retarde la douloureuse échéance où il faudra bien appeler un « chat, un chat » et un « génocidaire, génocidaire ». « Il faut oublier, tout oublier… » chanteront les âmes sensibles… Encore un peu de temps, Messieurs Dames… Les derniers témoins finiront bien par disparaître et il n’en restera plus un pour reprocher leurs lâchetés aux hommes dont vous persister à fleurir les tombes. Mais quand l’Histoire lèvera le voile pudique sur la cruelle vérité, vos yeux se dé-cilleront… Il sera trop tard.

Guy Bezzina