Nice. Mais qui a peur de Chantal Montellier ?

Le mélange de fascination et de crainte que Chantal Montellier a suscité a souvent relégué son art au second plan dans l’histoire de sa réception critique, alors qu’il aurait dû être au centre de l’attention. Cette exposition niçoise - du 1er mars au 15 août, à la Villa Arson - se concentre sur la période la plus prolifique de la carrière de Montellier, pour inscrire son œuvre dans l’histoire de la bande dessinée comme l’une des plus politiquement pertinentes de son époque.



- Ah! Nana interdit par des hommes, Chantal Montellier, 1978 -


De 1978 à 1994, de ses débuts dans Charlie Mensuel, Ah ! Nana et Métal Hurlant à la publication de la troisième (et hélas dernière) aventure de Julie Bristol aux éditions Dargaud, Chantal Montellier a produit un des corpus de bandes dessinées les plus singuliers dans la persistance de son rapport critique au monde. Dans son contexte de parution, le fait qu’une femme produise une telle œuvre était sans doute impensable et le silence actuel autour de son œuvre est peut-être entretenu ou savamment organisé par ceux qui hier avaient du mal à le penser. C’est ainsi que tout au long du parcours artistique de Chantal Montellier, la réception de son œuvre se présente - malheureusement - comme un cas d’école de l’histoire de l’art féministe.

Cette exposition se propose de rendre à nouveau visible une œuvre devenue invisible par la multiplication des carences éditoriales et entend contribuer à la préservation de cette œuvre, dans une perspective résolument matrimoniale. Mais si la forme de l’exposition s’est imposée, qui plus est dans le contexte d’un centre d’art contemporain, c’est aussi que l’œuvre en bande dessinée de Chantal Montellier réclame une attention accrue à la forme comme aboutissement d’une réflexion critique. Fidèle au format du 48CC, Chantal Montellier n’est pas une romancière graphique (bien qu’elle soit par ailleurs une romancière tout court), mais une artiste de la planche. Il est possible de passer à côté de son œuvre, pour peu qu’on ne soit pas sensible aux jeux savants des constructions, aux effets de rime et de symétrie, de mises en abyme multiples, bref à la dimension réflexive d’un travail qui en appelle à l’intelligence de celles et ceux qui le regardent plutôt qu’à leurs instincts consommateurs.

  • L'exposition est organisée en partenariat avec l’École nationale supérieure d'art et de design de Nancy. La Villa Arson remercie les prêteurs, la Fondation Michel-Édouard Leclerc et la Galerie Huberty Breyne ainsi que le MAMCO Genève.