Vins bio : un plus ?

La nouvelle étude de Magali Delmas, économiste de l’environnement à UCLA et Olivier Gergaud, économiste à KEDGE, révèle que les vins certifiés biologiques par un organisme d'accréditation sont jugés meilleurs que les vins sans certification. Cette étude a été réalisée sur 128 000 vins français produits de 1995 à 2015, et évalués auprès de trois guides des vins réputés : Gault & Millau, Gilbert & Gaillard et Bettane Desseauve.



- Haut Var, photo AD -


Cette étude fait suite à une étude réalisée en 2016 par les mêmes auteurs les vins californiens avec des résultats similaires. En effet, on apprend ainsi que les vins éco-labellisés biologiques ou biodynamiques de la principale région de production des États-Unis obtiennent en moyenne des notes supérieures à celles des vins conventionnels (+4,1%). Cette dernière étude menée par les chercheurs Delmas et Gergaud se focalise sur les cépages français afin de vérifier si les résultats restent valides pour le deuxième plus grand producteur de vin du monde (après l'Italie). Les traditions viti-vinicoles de la France remontent en effet à 2 600 ans et, en 2019, la France a produit près de 4 milliards de litres de vin.

Les vins certifiés bio sont en moyenne mieux notés que les vins conventionnels (+6,2%) ou ceux ayant adopté un label sans contrôle par une partie tierce (lutte raisonnée). Des différences encore plus importantes ont été obtenues entre les vins biodynamiques certifiés soit par l'association Demeter ou Biodyvin. La différence par rapport aux vins conventionnels ou raisonnés est de l’ordre de 11,8%. Les producteurs de vins biodynamiques utilisent des méthodes différentes de celles de l'agriculture biologique. Ils adaptent, par exemple, leurs méthodes de production (taille, récolte, etc.) en fonction des cycles saisonniers et lunaires ; ils intègrent également la vie animale dans le processus afin de créer et maintenir un écosystème équilibré et protecteur de la vigne.

Magali Delmas indique que « Les raisins cultivés de manière conventionnelle utilisent plus de pesticides que la plupart des autres cultures ; cela met en danger la santé des travailleurs agricoles, de la faune et des communautés voisines ». Les dangers de l’utilisation des pesticides dans la vinification ont été mis en évidence de façon spectaculaire en 2014, lorsque des enseignants et des élèves d’une école rurale de la région de Bordeaux ont été hospitalisés en raison d’une exposition aux produits chimiques toxiques. Des manifestations ont suivi et les vignerons ont dû faire face à une forte pression publique. Depuis, l'industrie du vin en France a évolué plus rapidement vers des méthodes respectueuses de l'environnement et développé la certification.

Plutôt que de se tourner vers des tiers pour certifier que leurs vins sont biologiques ou biodynamiques – ce qui impliquerait des inspections et des audits pour s'assurer que les produits répondent à certains critères – certains vignerons français ont élaboré leur propre norme de certification avec l'industrie. Or, l’étude de Delmas et Gergaud montre que ces vins sous label « Lutte raisonnée », sans partie tierce dans la plupart des cas n’ont pas tenu les mêmes promesses au plan gustatif que les vins labellisés par des parties-tierces (bio ou biodynamiques). Les vins labellisés sans partie tierce obtiennent en effet des scores similaires à ceux des vins conventionnels. 

De plus en plus de vignerons français choisissent de produire leurs vins selon des méthodes bio ou biodynamique. Entre 2001 et 2019 les vignes en appellation biologique ont progressé de 1,5 à 14,1% en France soit 112 057 hectares (Source : Agence bio 2019). « Dans certaines appellations comme Saint-Emilion, des collectifs de châteaux comme celui formé par les 6 châteaux Corbin ont vu la qualité de leurs vins s’améliorer de manière impressionnante depuis que ces derniers ont adopté des méthodes de production respectueuses de l’environnement. » précise Olivier Gergaud.

  • Dans son livre de 2018 « The Green Bundle: Pairing the Market with the Planet », Magali Delmas suggère que les producteurs de vin annoncent la qualité de leurs produits plutôt que leurs avantages environnementaux. Et qu'ils communiquent que les pratiques biologiques et biodynamiques sont en fait conformes à des pratiques séculaires – un clin d'œil au fait que l'industrie est si ancrée dans la tradition – alors que l'utilisation de pesticides synthétiques n'a commencé que dans les années 1930.