Alain Juppé : écologiste mais écologiste libéral,

voire ultra-libéral…

- Alain Juppé à Cannes, entouré du maire Bernard Brochand
et de son adjoint David Lisnard -

Il y a mille et une manières de décliner l'écologie, la défense de l'environnement et le développement durable. De la façon généraliste, celle de Nicolas Hulot, brillant touche à tout, qui voit les choses de très haut et a du mal à choisir une option. La terre va mal, ça il en est sûr. Il faut faire quelque chose sans tarder, nouvelle certitude. Toutes les solutions lui paraissent bonnes. Peu lui importe au fond qu'elles soient mises en œuvre par une politique de droite ou de gauche, pourvu que ça bouge.

Nicolas Sarkozy élu, c'est donc une écologie de droite, bien libérale qui va se mettre en place. Le nouveau président a fait ce qu'il avait dit qu'il ferait, n'en déplaise à Claude Goasguen - ex-porte parole du candidat de l'UMP lire - qui avait prétendu le contraire. Il n'a pas choisi Nicolas Hulot pour diriger un tel ministère et sans doute a-t-il eu raison. L'homme d'Ushuaia n'était pas l'homme de la situation, trop tendre, trop sensible, trop vulnérable… Il valait mieux une bête politique et son choix s'est porté sur Alain Juppé, de retour aux affaires, après un an de purgatoire au Québec. Purgatoire qui lui fut finalement très utile. Il revient frais et dispos pour diriger la mairie de Bordeaux, le cartable plein d'idées nouvelles.

C'est dans la Belle Province qu'Alain Juppé a pris conscience des problèmes environnementaux. Nos cousins sont en effet en plein dedans. Les changements climatiques les touchent de plein fouet. Leur pays n'a plus seulement l'hiver comme saison. De moins en moins de neige, des températures qui oscillent, passant inopportunément du trop au pas assez. Les régions soumises au permafrost diminuent, troublant la faune et la flore. Les étés sont aussi perturbés et moins agréables. Un avenir qui s'annonce rien moins que réjouissant.

Voilà donc Juppé, numéro deux du gouvernement Fillon, un beau lot de consolation pour le l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac, "le meilleur d'entre nous". Il se voit confier un super ministère de l’Ecologie, du Développement, et de l’Aménagement durable. Mais dans un gouvernement de droite, il ne mènera pas la politique rêvée des Verts. Pas question de se priver du nucléaire à l'heure où les réserves de pétrole s'amenuisent dangereusement. Pas question non plus d'appliquer le principe de précaution sur le dossier des OGM… Ce sont des choix qu'il conviendra d'assumer plus tard.

Alain Juppé annonce déjà la couleur – c'est pas le vert, on l'aura compris - et il a bien fallu qu'il soit sûr de son coup, pour aussi vite se mettre en mouvement… Son ministère sera organisé en quatre pôles : les transports et les déplacements, l’habitat, l’aménagement urbain et l’aménagement du territoire, et enfin l’écologie de base, biodiversité, eau, … il interviendra aussi en matière d’évaluation environnementale des politiques publiques, et aura un rôle à jouer au plan européen et international.

Nicolas Sarkozy a tenu sa promesse de créer un grand ministère de l'environnement et du développement durable. Alain Juppé est maintenant aux commandes. Sortira-t-il l'écologie de son carcan politique et social ? Réussira-t-il, là où tous les autres ministres et secrétaires d'état ont échoué, incapables d'imposer des idées fortes, acceptant de jouer les utilités et les faire-valoir, attendant, en bons soldats disciplinés, qu'on veuille bien leur confier d'autres responsabilités, plus valorisantes…

La liste est longue de ceux qui, avec un budget de misère, ont failli entreprendre quelque chose de notable. De Robert Poujade à Nelly Ollin, en passant par Dominique Voynet, Brice Lalonde, Ségolène Royal ( la plus nulle ), Michel Barnier ou Roselyne Bachelot, rares sont ceux qui peuvent se vanter d'avoir fait bouger le mammouth, encroûté dans son permafrost. Seule peut-être Corinne Lepage échappe à cette triste litanie. Même sans réels moyens financiers, elle a eu au moins le courage de ne pas être politiquement correct, par exemple sur le dossier du bioéthanol. C'est elle qui nous a fait réaliser que ce biocarburant ne serait qu'un pis-aller. Que, pour le produire dans des quantités suffisantes, il faudrait livrer d'immenses étendues à une agriculture polluante et consommatrice, elle aussi, d'énergie, d'eau et d'engrais…

Les écologistes de tout poils, verts, bleus ou rouges, regarderont dans les semaines et les mois à venir comment se traduira sur le terrain la volonté politique affichée par ce gouvernement Fillon. Sur ce vaste sujet, qui déborde des cadres traditionnels attribués à un ministère ou à un autre, ne manqueront pas de créer des problèmes. Ceux qui s'inquiètent d'un futur pour la planète, ne peuvent que souhaiter bonne chance à Alain Juppé, si tant est que le libéralisme soit bien la clef du problème…

- mention : www.pariscotedazur.fr - mai 2007 –
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