Les festivals profitent-ils davantage au cinéma que le cinéma profite aux festivals ?

Provocante question posée par des professionnels italiens.

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Un jour, il y eut le Festival de Venise, La Mostra. Il eut pu rester le seul, l’unique, la référence absolue. Manque de Pô, il prit naissance dans une période guerrière et l’Italie avait choisi le mauvais camp.

La France créa son festival pour concurrencer Venise. C'était un acte politique. Elle réussit, non sans mal et tâtonnements laborieux, à en faire l'événement le plus médiatisé après les Jeux Olympiques. Soixante ans plus tard, le Festival de Cannes se porte bien et reste la référence qu'il est devenu.

Si Venise et Cannes ne se sont jamais mariés, on pourrait se demander alors comment ils ont fait pour donner naissance à une si nombreuse progéniture. Les petits sont devenus grands, voire très grands. Berlin, le fils aîné, Toronto, Montréal, Sundance, Deauville, Rome, un des derniers nés…La liste est longue car chacun a hérité la capacité de se reproduire. Au point de voir naître, dans bientôt chaque ville de province, chaque village, des descendants des Adam et Eve de ces manifestation, le plus souvent culturelles. Au point de se demander parfois qui fait la femme et qui porte la culotte…Tous ces petits ne font pas tous du cinéma mais tous doivent à leurs ancêtres ce pouvoir attractif qu'a sur l'humanité, la fête…

Les professionnels qui s'étaient retrouvés au congrès organisé par l'Association des festivals du cinéma italien étaient venus là pour débattre. Ils s'y sont donnés à cœur joie. Pourquoi les festivals continuent-ils à se multiplier (j'aurais écrit se reproduire) alors que le cinéma est en crise ? Les festivals servent-ils les films ou bien les films servent-ils les festivals ? J'ajouterais, a-t-on besoin d'autant de festivals, a-t-on besoin de festival tout court, longs métrages ou pas ?

Certains répondirent un peu facilement : si les festivals n'existaient pas, il faudrait les inventer. Plus sérieusement d'autres se sont attachés à mettre en évidence leur rôle plutôt positif. Tel Severino Salvemini, professeur d'université et conseiller de Cinecittà, qui n'y voit que des répercussions qui vont dans la bonne direction, "notamment sur les entrées, le tourisme, le travail et les revenus de ce secteur, ainsi que sur la formation du goût esthétique des spectateurs et sur l'attractivité du cinéma pour les talents de la création"…Il reste qu'il est difficile de déterminer, un peu comme pour les prix littéraires, l'exacte relation qui existe entre les prix reçus dans les festivals et le succès des films en salle.

Pour le démontrer, Severino Salvemini a comparé cinq des plus grandes manifestations internationales : Berlin, Cannes, Venise, Toronto et Locarno et mis en évidence des résultats contradictoires. Le Festival de Cannes semble être le plus efficace avec 12 films primés sur 14 qui ont obtenu des résultats importants au box-office. Ce qui n'est pas du tout le cas de Toronto.

D'autres intervenants ont mis en lumière les rôles prépondérants des "commerciaux", vendeurs et distributeurs, les producteurs n'apparaissant, curieusement, qu'après dans cette chaîne de responsabilités.

Il y a, d'un côté la technique, la création, l'art et puis de l'autre l'habileté, le savoir vendre. Rares sont ceux qui possèdent les deux, d'où l'intérêt que peu représenter les Festivals qui sont aussi des marchés de films…