La guerre des tarifs. La mondialisation en question…
Initié du jour au lendemain de sa réélection providentielle, Trump jette le doute sur l’avenir du commerce. Il en résulte une inquiétude générale qui force les États et les entrepreneurs à revoir leur copie et à changer leurs habitudes. Faut-il s’en alarmé pour autant sachant que le propre de l’homme, c’est de s’adapter ? Une enquête exclusive d'Allianz Trade, réalisée au plus fort de la guerre commerciale américaine, révèle le poids de cette guerre commerciale et les mécanismes mis en place. Extraits :

- Trump, le grand perturbateur...
Selon les conclusions de l’édition 2025 du Global Survey d’Allianz Trade publiée aujourd'hui, l'imprévisibilité de la politique commerciale américaine a accru l'incertitude pour les entreprises à travers le monde. Couvrant près de 4 500 entreprises en Chine, en France, en Allemagne, en Italie, en Pologne, à Singapour, en Espagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis, et menée en deux phases (avant et après l'annonce des droits de douane le 2 avril lors du « Liberation Day »), cette enquête révèle un changement radical dans les prévisions de croissance à l’export, la perception des risques, notamment en matière de retards de paiement, ainsi que dans les différentes stratégies mises en place pour atténuer les effets de la guerre commerciale.
Selon Aylin Somersan Coqui, CEO d'Allianz Trade : « Contrairement à l'optimisme qui régnait avant la vague de droits de douane du 2 avril, le Global Survey de cette année confirme ce que nous observons sur tous les marchés : l'incertitude et la fragmentation deviennent structurelles. Le Liberation Day a mis en évidence la vulnérabilité des entreprises dont les chaînes d'approvisionnement et les marchés d'exportation sont très concentrés. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : les prévisions positives sur les exportations à l'échelle mondiale sont passées de 80 % à 40 %, et 42 % des entreprises s'attendent désormais à une baisse de leur chiffre d'affaires à l'export comprise entre -2 % et -10 %, contre seulement 5 % avant les annonces du 2 avril. Malgré les accords bilatéraux conclus récemment avec le Royaume-Uni et la Chine, nous estimons que les pertes mondiales à l'export atteindront 305 milliards de dollars en 2025. Les entreprises ne restent pas les bras croisés. Après avoir traversé des chocs successifs depuis 2020, elles s'adaptent une nouvelle fois, diversifient leurs partenaires, reconfigurent leur logistique et intègrent le partage des risques tout au long de la chaîne de valeur. Dans le contexte commercial actuel, le succès dépend de plus en plus de la capacité à s’adapter. »
Le répit temporaire dans la guerre commerciale devrait inciter les entreprises à continuer d’anticiper leurs achats jusqu'à l'expiration des suspensions de 90 jours (le 12 août pour la Chine et le 8 juillet pour le reste du monde), comme elles l'ont fait en début d'année : 86 % des entreprises américaines ont déclaré avoir anticipé leurs livraisons en provenance de Chine et de l'UE avant l'entrée en vigueur des droits de douane.
Peu d'entreprises ont l'intention d'absorber la hausse des coûts ou de réduire leurs prix à l'export pour maintenir leur part de marché, en particulier aux États-Unis, où plus de la moitié des entreprises prévoient d'augmenter leurs prix (54 %). En raison de la forte incertitude, l'approvisionnement auprès de nouveaux marchés devrait se poursuivre, cette option étant la deuxième plus prisée parmi les moyens d'atténuer l'impact des droits de douane, en particulier en Pologne et en Espagne. La diversification des chaînes d'approvisionnement et des bases de clientèle est une stratégie durable d'atténuation des risques, ce qui n'est pas surprenant étant donné que 54 % des personnes interrogées considèrent les risques géopolitiques et politiques ainsi que les troubles sociaux comme l'une des trois principales menaces pour leurs chaînes d'approvisionnement. Plus d'un tiers des entreprises interrogées ont déjà trouvé de nouveaux marchés à l’export, tandis que près des deux tiers prévoient de le faire.
Avant les annonces du 2 avril, 62 % des entreprises françaises interrogées ont indiqué que les droits de douane imposés par les États-Unis n’auraient pas d’impacts sur les prix proposés au consommateur, 25 % d’entre elles souhaitant absorber les coûts supplémentaires, alors qu’à l’inverse, la même proportion déclarait vouloir augmenter ses prix. Cependant, lors de la deuxième phase de sondage (après le Liberation Day), les entreprises ne sont plus que 56 % à ne pas voir d’impacts négatifs des droits de douane pour leurs clients (33 % souhaitant plutôt rechercher de nouveaux fournisseurs, 17% rechercher des débouchés dans de nouveaux marchés et 18 % absorber les coûts), elles sont en revanche 30 % à indiquer préparer une augmentation de leurs prix. Par ailleurs, 90 % des entreprises interrogées indiquent vouloir renégocier leurs contrats, dont 45 % qui ont pour projet de changer de fournisseurs
« Les grandes entreprises ont tendance à subir des retards de paiement plus longs, 26 % des entreprises interrogées dont le chiffre d'affaires est supérieur à 5 milliards d'euros étant confrontées à des délais de paiement supérieurs à 70 jours, contre 18 % pour l'ensemble de l'échantillon. Cela suggère que les grandes entreprises jouent de plus en plus le rôle de banque invisible pour les plus petites entreprises. Confrontés à des cycles de paiement plus longs et à des risques d'insolvabilité croissants, les exportateurs sont contraints de répercuter les coûts, de s'approvisionner sur de nouveaux marchés, voire de reconsidérer l'ensemble de leur présence internationale », conclait Ana Boata, Directrice de la recherche économique chez Allianz Trade.