Golfe Juan. Mathieu Allinei, l’audace marine en cuisine...
Nicolas Davouze au Bacon, Gérald Passédat au « Petit Nice » à Marseille, de Christophe Coutanceau à La Rochelle, et des frères Minchelli au « Duc » à Paris, références marines par excellence, Mathieu Allinei sort du lot de façon inattendue et même époustouflante, avec une cuisine de la mer inédite, originale, qui fait de lui l’un des chefs explorateurs les plus inventifs de son époque. On le suit dans son odyssée :
Un travailleur de la mer créatif et passionné
Œil vif et brillant, droit dans son tablier, autodidacte, serveur de restaurant (Tétou) avant de s’investir dans son propre restaurant, il a appris à aimer le poisson et le milieu marin qui l’entourent. Curieux de tout, c’est un chercheur de la mer qui a l’obsession de vouloir faire goûter la mer, de l’amuse-bouche au dessert compris, dans ce qu’elle a de plus subtil, pure et naturel, de plus insolite, sans artifice, pour le simple bonheur de ses clients.
Dans ses créations marines, tout ce qui vient de la Méditerranée est bon pour lui : à commencer par les algues, la laitue de mer, les anémones et les tomates de mer, les concombres aussi, des fonds sablonneux… Ce sont des saveurs inconnues qu’il cherche constamment à valoriser, en les mitonnant à sa façon par déshydratation, réhydratation, séchage, fumage, ou fermentation. Sa recherche est inédite et ses explorations quotidiennes. A découvrir d’urgence, avant que Michelin lui colle une première étoile.
Des saveurs rencontrées nulle part ailleurs
Chaque plat est l’occasion d’une nouvelle émotion, fruit de multiples trouvailles. Ses vinaigres sont à base d’écorces de bergamote et de bonites séchées. Ses fermentations, à base de cristes-marines ou d’algues, rehaussent le goût des poissons, juste ce qu’il faut. Ses arêtes de poissons, salées, fumées, et séchées sur sa terrasse, constituent la base de ses bouillons. Sa sauce soja fermente toujours avec plusieurs types d’algues. Les carcasses de langoustes, tout comme l’encre de seiche, sont séchées puis réduites en poudre, toujours pour apporter ce petit plus qui fait la différence. Tout se tient et se répond. « Umamiesque » !
Des explorations marines addictives
Mathieu Allinei n’a donc pas son pareil pour nous surprendre et nous faire goûter quelque chose que nous ne connaissons pas. En guise d’apéritif, vous pourrez opter pour son « Gin Tonic à la Laitue de Mer », plein de fraîcheur marine. A tester aussi, en amuse-bouche, sa sphérification à l’eau de mer, une sorte de capsule de gelée d’eau de mer aux algues fermentées, posée sur un galet, pour vous donner l’impression de manger une huître... A accompagner d’un beurre au pissalat qu’il baratte lui-même (c’est rare). Son pissalat est fait à base d’anchois au sel, fermentés durant 40 jours dans sa cave.
Puis viennent un choix d’entrées. Le Foie de Baudroie posé sur une pierre, entouré de son écume d’eau de mer, d’un confit d’agrumes et d’une brioche aux épices de rouille. Ou les Gnocchis à l’Encre de Seiche, Farcis de Concombre de Mer et son Écume à la Tomate de Mer. Ou encore, les Anémones de Mer en Beignets, Sorbet à l’Anémone de Mer accompagné d’une Salade d’Herbes marines, Cristomarine, Salicornes et Feuilles d’Huîtres, au Gel d’Eau de Mer. On se régale aussi d’un Carpaccio de Thon à l’huile d’herbes fraîches (plus classique), ou d’une ribambelle d’Anchois crus au Vinaigre de Bonite séchée, Poudre de Parmesan et Encre de Seiche… une belle façon pour le chef de montrer son talent pour la fameuse spécialité japonaise, le Katsuobushi, si prisé en Asie.
Le Poulpe est servi à l’étouffée dans un bouillon de bœuf, avec un pistou de cristomarine et jaune d’œuf mariné au vinaigre de bonite, pour arrondir le goût du bouillon. La daurade, le loup et autre poissons locaux sont le plus souvent cuit à la braise d’un grill au feu de bois. Comble du détail : la tête du poisson est servi à part, braisé dans un fumet de poisson ! Certains légumes sont eux à la cendre, voire légèrement brûlés, comme pour apporter une nouvelle saveur subtile et inattendue.
Tout aussi emballant, ses sorbets « Bergamote et Violet » : on a le goût du violet sans l’amertume avec la fraîcheur douce de la bergamote, ou cet autre de la même veine, le « Sorbet à la Tomate de Mer et au Citron », car la mer se marie très bien avec les agrumes. Une belle évidence qui permet une fois de plus au chef d’exceller dans les desserts marins : Mille-Feuille Vanille , Caramel salé et Encre de Seiche ou encore Citron à la Faisselle de Gréolière et Laitue de Mer…
Visiblement, le chef a besoin de s’amuser tout en prenant des risques. C’est un travailleur de la mer, qui finira par être reconnu. Car chez lui, on prend la mer en pleine figure !