Santé. Faire passer la pilule…
La moitié des médicaments achetés en pharmacie ne sont pas utilisés. Cela représente un gaspillage de plusieurs milliards € par an en France, soit parfois des centaines € pour une seule personne - c'est énorme et c’est coupable.
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Photo Ralf
Roletschek
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Pour arrêter ce gâchis faramineux, une solution de bon sens existe depuis longtemps dans un grand nombre de pays : la vente de médicaments à l'unité, qui permet au patient d'acheter ni plus ni moins que ce dont il a besoin... au lieu de l'obliger à acheter des boîtes entières à chaque fois. Dans les pays pauvres comme Haïti où je me suis trouvé, c’est une évidence. Les médicaments y sont rares et chers. Au Canada, pays riche, la délivrance des médicament obéit néanmoins à ce même principe élémentaire d’économie et de sécurité aussi. Mesure anti-gaspillage où le consommateur et les services de santé sont gagnant gagnant.
Pendant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait déclaré que la mise en place de la vente de médicaments à l'unité en France était « un impératif sanitaire, une nécessité économique et une évidence environnementale. » Mais depuis qu'il a été élu, il y a bientôt deux ans, cette promesse de campagne « reste en cours de réflexion au ministère des Solidarités et de la Santé ».
Un projet de loi sur la santé est en cours d'examen au Parlement. C'est une opportunité à saisir pour lancer enfin la vente des médicaments à l'unité. Le blocage vient évidement des fabricants de médicaments, qui font pression pour empêcher la vente à l'unité. Il faut dire que le gaspillage des médicaments leur rapporte gros : 29 milliards € de chiffre d'affaires en 2017. Le lobby de l'industrie pharmaceutique est en première ligne pour défendre ses acquis et sa prospérité économique. Nous retrouvons d’ailleurs la même attitude de la part du lobby des fabricants de cigarettes, de pesticides, de cosmétiques… La santé des consommateurs ne semble pas être leur premier souci.
Quant à l’argument des industriels qui s’abritent derrière le fait que cette vente à l’unité les obligerait à revoir les chaînes de fabrication, que cela serait très compliqué et coûteux, que font-ils de l’intérêt des consommateurs et du système de santé sociale dans le rouge ? Comment font-ils d’ailleurs dans tous les pays où les médicaments sont déjà distribués à l'unité comme au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, au Canada, aux États-Unis, en Afrique et en Amérique du Sud ? Perdent-ils pour autant de l’argent, des parts de marché ?
Certes
les pharmaciens devront se
réorganiser.
Mais se serait l’affaire
de quelques mois guère plus.
D’ailleurs,
une
première expérimentation a
déjà été faite en 2015 dans soixante-quinze pharmacies. Avec
des résultats très positifs :
moins de médicaments délivrés et des traitements mieux suivis.
Cette
mesure de bon sens permettrait d’économiser
des millions €
chaque année au système de santé. Sachant
que la récupération des médicaments non utilisés est aléatoire
et qu’ils finissent le plus souvent dans nos poubelles, cela
diminuerait d’autant la
pollution de notre
environnement. Mais
pourquoi se précipiter alors
qu’on peut attendre… indéfiniment,
semble être ici le maître mot.
Une pétition en faveur de la vente des médicaments à l'unité
circule sur les réseaux sociaux. Libre à nous de la signer et de la
faire circuler.
Références :
-
Médicaments : des milliards d'euros gaspillés. (Le Figaro)
-
Médicaments à l'unité : réponse du ministère des Solidarités et de la Santé à la question écrite d'un sénateur. (Sénat)
-
Entretien avec Marisol Touraine. (Les Échos)
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Les dépenses de santé en 2017. (Direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques)
-
Les conditionnements ne favorisent-ils pas le gaspillage ? (Les Entreprises du médicament)
-
Les bénéfices de la vente d'antibiotiques à l'unité. (Inserm)