Sur mes étagères : « Juge sur la Côte d’Azur »…

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Catégorie Pieds dans le plat

Jean-Pierre Murciano publiait en 2001 un livre sur le difficile exercice de juge d'instruction, particulièrement sur la Côte d’Azur. Ce n’est pas le procureur niçois, Eric de Montgolfier qui dirait le contraire d’ailleurs, lui aussi ayant eu à faire face à l’influence majeure de la franc-maçonnerie… Il y livrait sa vérité, sa version sur certains événements et ses démêles avec sa hiérarchie.




Avec trop peu de moyens, beaucoup de pressions médiatiques, Eric Murciano à Grasse comme Eric de Montgolfier à Nice, avait voulu donner un coup de pied dans la fourmilière. La fourmilière des petits arrangements entre amis de circonstance autant que d’intérêts, des complicités implicites ou explicites, des pot de vins institutionnalisés. N’en jetez plus, la... cour est pleine.


En s'attaquant de plein fouet aux multiples organisations mafieuses, on prend le risque bien sûr d’un retour de… bâton. Celui-ci viendra de sa hiérarchie qui lui reprochera la longueur de ses instructions et des ratés dans ses procédures. Il fera aussi l'objet d'une réprimande de la part du Conseil supérieur de la magistrature probablement pour sa dénonciation de la franc-maçonnerie au sein de sa profession. Mais n’aurait-il pas raison en s’interrogeant : « Comment un juge franc-maçon peut-il se montrer impartial quand il doit se prononcer dans une affaire qui met en cause des frères qu'il connaît ? » Il lui aura fallu attendre 2005 pour être définitivement réhabilité par le Conseil supérieur de la magistrature sur le dossier très médiatisé Tapie/Crédit lyonnais.


Beaucoup d’autres noms apparaissent dans ce livre… réquisitoire. Ceux de Michel Mouillot, Pierre Botton, François Mitterrand, Pierre Merli maire d’Antibes, Michel Pellerin, Claude Muller, Jean-Claude Godin (sur le dossier Yann Piat), Guy Lux (qui passera une nuit à la prison de Grasse), la présentatrice de TL Danièle Gilbert, Léotard…


Les « affaires cannoises » retiendront souvent son attention. Il est vrai, elles furent nombreuses à le solliciter. La dernière en date concernera l’établissement de la Croisette, le Baoli. Le magistrat mis en examen sept personnes pour « corruption, favoritisme, abus de confiance, trafic d'influence, détournements de fonds publics ». Toutes étaient proches de l'ancien maire UMP de Cannes Bernard Brochand et actuellement doyen de l’Assemblée nationale (donc bénéficiant de l’immunité) dont son deuxième adjoint, Christophe Santelli-Estrany, ses deux conseillers spéciaux André Taddeï et Daniel Alessio, ainsi qu'une conseillère municipale et plusieurs fonctionnaires.


Jean-Pierre Murciano a pris sa retraite en 2017. Sans doute a-t-il emporté dans ses dossiers quelques secrets qu’il ne peut révéler et aussi beaucoup de frustration de n’avoir pu en faire aboutir certains parmi ceux qui lui tenait le plus à cœur. Ainsi évoquait-il avec prudence à Alain Laville journaliste de Nice-Matin en 2007, une autre affaire sulfureuse qui concerne « un illustre hôtel de la Côte » (certains cannois apprécieront), transformé en résidence hôtelière qui sera sciemment inexploitée, saisie, revendue, transformée en appartements avec l’approbation du Conseil municipal, et à la clef, quelques avantages... substantiels.


Mais le sous-titre de son livre : « Missions impossibles », n’est-il pas en soi suffisamment révélateur ?