Monologue de la mort
- poème –
Je ne sais pas pourquoi j'étonne les vivants, Pourquoi je suis pour eux la brutale, l'étrangère, Je suis la Némésis, je suis le noir archange Qui vient sans qu'on le veuille, en tout lieux, en tout temps.
L'aïeul dans son fauteuil, le bambin dans ses langes, Je prends d'un même coup le vieillard et l'enfant, Celui qui se morfond, celui qui se défend, Car c'est toujours pour moi l'heure de la vendange.
Mais je ne sais pourquoi me détestent les gens, Ce peuple qui gémit, qui sommeille, qui mange, Qui donc le tirerait, sinon moi, de sa fange, Qui donc délivrerait ces foules d'indigents ?
Je ne sais pas pourquoi sur toute la planète, Malgré leur paradis, leurs idoles, leurs dieux, Malgré que leur destin soit souvent odieux Je ne suis à leurs yeux qu'un grimaçant squelette.
Ils sauront quelque jour combine ils eurent tort, Je ne leur serai plus un effrayant problème, Car je suis un moment de la Vie elle-même Et dans cet univers, il n'y a pas de mort !
- 1940 - 50 -