L’Algérie française résonne toujours dans le cœur des pieds-noirs...
Joselyne Mas, n’est pas à court de nostalgie. Elle évoque ici la ville de Boufarik qu’on appelait « la verte émeraude de la Mitidja ».
Le destin a fait que je suis née en France, dans cette France de l'autre côté de la méditerranée. Si j'étais née dans un petit village du Jura ou d'Auvergne par exemple, je pourrais sans problème revoir mon village natal, mon école, mon quartier, retrouver peut-être des amis d'enfance mais pour moi ce n'est pas possible. Je ne peux pas revenir sur ma terre natale, et même si cela se faisait, je ne retrouverais pas ma maison, mon école car tout cela a disparu. Il ne reste plus que les souvenirs : pierres précieuses que l'on aime à partager.
Trois petites syllabes résonnent dans ma tête : Bou fa rik, elles tourbillonnent, dansent et décrivent une farandole. Et cette petite musique emplit mon cœur de bonheur.
Quand cette ritournelle se met en route, alors des images défilent devant mes yeux, je ne vois plus la mer et la Croisette ni les palmiers du square. Je vois de grandes étendues d'orangers en fleurs et un parfum subtil m'enivre, le ciel devient plus bleu, plus lumineux et mon âme s'évade, elle traverse la méditerranée et se pose à Boufarik.
Je me promène dans la rue Duquesne avec ses grands arbres, j'arrive à la mairie, je traverse sa place avec ses palmiers; Les odeurs m'assaillent, j'en ai des vertiges. Je déguste les dattes fourrées d'Henri Olcina et je sens dans ma bouche leur goût inimitable, onctueux et doux, parfumées à l'eau de rose ou à l'eau de fleur d'orangers. Je me promène et je file vers les plages soit à Daouda-Marine, soit à Castiglionne avec ses rues bordées de mûriers et de lauriers roses, le kiosque, l'école, la salle des fêtes, la cascade du bonheur et la mer : ses plages de sable fin et le boulevard de Front de mer.
Et tout à coup, un gros nuage cache le soleil, je cligne des yeux et les images chères à mon cœur ont disparues. Je regarde sans les voir vraiment la baie de Cannes, les palmiers de la Croisette et la tristesse m'envahit. Mais ai-je le droit de me plaindre ? Mes souvenirs sont en moi, enfouis bien profond dans leurs petits tiroirs, je les garde précieusement. Ils réchauffent mon cœur.
Comme une mère, une terre natale ne se remplace pas.