Un ciel de nage...
Cannes, 1998...

Le ciel était gris, la mer d’huile, si grise que l’on avait du mal à trouver la ligne qui les séparait. Ce matin, l’eau avait beau être transparente, la lumière du jour ne pénétrait vraiment qu’une faible couche de la surface.
Le vent de terre, forcit un peu amenant avec lui les odeurs des herbes foulées et les fleurs de la nuit. Dans moins d’une heure, il serait relayer par le vent de mer qui apporterait une discrète odeur d’iode et d’algue humide.
Nous avons commencé à nager, côté à côte, nous efforçant d’aller au même rythme. Nous connaissions déjà le parcours. Nous savions que nous rencontrerions sur le chemin marin les mêmes petites touffes de posidonies et leurs colonies de petits poissons de couleur bleu ou marron. Il y aurait aussi sur le trajet de petites accumulations de déchets venant de plusieurs émissaires chargés d’acheminer les eaux des valons vers la mer.
Plus attachés à garder l’harmonie du geste que sa perfection technique, nous avons parcouru l’habituel sentier marin. Au retour, j’apercevais, en tournant la tête sur le côté, les deux îles qui flottaient à l’horizon et quelques mâts qui, effet optique aidant, me semblaient à une centaine de mètres de nous.
Nous n’étions pas en compétition mais nous nous servions l’un de l’autre pour maintenir un rythme soutenu. Après le premier kilomètre - plus ou moins la distance pendant laquelle le corps cherche un équilibre entre effort et respiration - viendrait le second souffle et après le second le.. troisième, pour trouver les ressources physiques et mentales de maintenir la cadence.
De retour sur le sable, le soleil était apparu. Adossés au mur de pierre qui avait emmagasiner la chaleur, nous avons vite séché. Sur la jetée, les promeneurs étaient emmitouflés et nous jetaient en passant prés de nous un regard tantôt étonné, tantôt complice. Les nuages commencèrent à traverser le ciel à toute allure. Bientôt ils auront tous disparu, chassés par le mistral, ce vent qui, en quelques heures, est capable de faire baisser la température de l’eau de quelque degrés. Il n’est pas sûr qu’il se calmerait ce soir.