Drawing Lab récompense Elika Hedayat...
La bourse de production Drawing Lab Project 2025, d’un montant de 20 000 euros, a été attribuée à l’artiste et à la commissaire d’exposition Valentina Ulisse. Elles exposeront au Drawing Lab leur projet intitulé « Haroum » du 17 octobre 2025 au 4 janvier 2026 et bénéficieront de l’édition d’un catalogue dédié.

- Elika Hedayat, Haroum #11 © Courtesy de l’artiste et de la Galerie Aline Vidal -
Dans plusieurs ouvrages de la littérature perse écrits entre le Xe et le XIIe siècle, Haroum est décrite comme une ville gouvernée par des femmes savantes, qui vivent en égalité et en paix avec l’environnement. Libres et indépendantes, elles semblent faire écho aux Amazones, femmes guerrières de la mythologie gréco-romaine, devenues un symbole de l’émancipation des femmes et de l’égalité des sexes. Dans ces anciennes épopées perses, animaux et créatures imaginaires occupent une place remarquable et, en constante alliance avec les humains, contribuent à brouiller les frontières existantes entre les genres et entre les espèces. Pour donner forme à sa propre vision de Haroum, l’artiste Elika Hedayat a souhaité mêler les références comme dans un « jeu de ficelles » fait de tours et d’écheveaux, proche de la « fabulation spéculative » de Donna Haraway.
Elle s’est nourrie autant de la littérature mythique de l’Iran, son pays natal, que de la littérature de science-fiction féministe et écologique contemporaine, tout en prenant comme fondement des théories scientifiques transdisciplinaires autour d’une idée de symbiose qui s’étend du vivant au technologique.
Aux tonalités fantastiques, son récit n’oublie pourtant pas l’actualité et les luttes des femmes iraniennes aujourd’hui. Elles sont constamment évoquées par l’artiste à travers l’utilisation de cheveux noirs (matières vivantes), de prises et de câbles (éléments technologiques). Se faufilant dans l’espace, ces filaments qui relient et connectent organismes et territoires se libèrent des constrictions et des pouvoirs. Ce sont les cyborgs, des présences-guides dans la narration. Leur intervention est discrète mais rhizomique : elles sont au cœur de l’évolution culturelle féministe et symbiotique de Haroum, qu’Elika Hedayat envisage comme une ville du futur.
L’exposition pensée pour le Drawing Lab se veut une découverte de ce monde encore en construction. Dans les oeuvres de l’artiste, Haroum apparaît comme une ville-laboratoire, en état embryonnaire ou au stade de maquette. Inspirées de la lecture de Vinciane Despret et des ingénieries animales observées par la « théroarchitecture », ces élévations montrent un art de l’édification qui n’est plus uniquement humaine, mais interespèce.

- Elika Hedayat, Haroum #9, 2025
© Courtesy de l’artiste et de la Galerie Aline Vidal -