Font-Romeu, Lycée et Centre national d’entraînement…

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Catégorie Les paradoxales

Nous avons eu le privilège, partagé avec David Dickson capitaine de l’équipe olympique australienne de natation, d’être invités quelques temps après l’ouverture de cette réalisation exceptionnelle, lors de la rentrée scolaire en 1967. Après les mauvais résultats sportifs obtenus aux JO de Tokyo de 1964 (1 seule médaille d’or en équitation), le Général de Gaulle souhaite lui aussi que la France honore et retrouve son rang de grande nation. L’idée d’un centre d’entraînement pré olympique germe et se concrétise très rapidement sur Font-Romeu sous l’impulsion de Maurice Herzog, alors Ministre des sports. Dès son ouverture, c’est le succès. Les athlètes en font un passage obligé. Pas seulement des Français. Les fédérations étrangères envoient leurs vedettes et nous y avions rencontré des nageurs anglais et russes en préparation préolympiques. Quand au Lycée, de nombreux sportifs y feront leur scolarité dont Camille Lacour, Martin Fourcade, Oussama Mellouli, et autres Yohann Diniz. D’où cet article écrit dans la... foulée.



- 1967, Font-Romeu, le Lycée climatique -


« Tout fier de l'aventure que je venais de vivre durant quinze jours, je voulus m'en vanter auprès d'une de mes relations, de celles dont on s'aperçoit avec le temps combien elles sont vraiment superficielles. Je lui dis « Je viens de Font-Romeu, du Lycée olympique... » Mais, avant de pouvoir manifester mon enthousiasme, ce dernier me coupa : « Font-Romeu, tiens, où est-ce à propos ? » Je jugeai donc inutile d'aller plus loin et, après lui avoir situé le lieu, je me gardai de développer. Car, pour trouver un quelconque intérêt à ce lieu et à son ensemble climatique et sportif, il ne faut rien moins qu'être un tant soit peu au courant de sport de compétition, d'éducation, de médecine, d'architecture, de nature... choses qui peuvent paraître arides et passionnent seulement un petit cercle d'initiés.

Permettez-moi donc ici de vider le trop-plein de mon enthousiasme. Font-Romeu, mais c'est formidable ! Pourquoi ? Parce qu'il y a là-bas du nouveau, et du nouveau captivant et audacieux, et cela en France, un projet mené à bien par des l’État. Comment a-t-on fait pour construire si vite un tel lycée, à quelque 1.850 m d'altitude ? En prenant le triple prétexte d'en faire un centre de préparation olympique, un lycée expérimental réservé à une élite de sportifs, ainsi qu'à quelques asthmatiques d’âge scolaire ? Peu nous importe les raisons qui ont prévalu et les moyens qu'il a fallu déployer. L’œuvre est accomplie et douze étages d'une architecture hardie et, je l’affirme, réussie (signée Roger Taillibert qui s’illustrera aussi par le stade olympique de Montréal), s 'élèvent maintenant dans le cadre magnifique de la forêt pyrénéenne.

Tout cela pour le bonheur d'une équipe de dirigeants-fonctionnaires (le mot n'est pas toujours péjoratif) qui cherchent, avec passion, à tirer profit de cet instrument remarquable. Peut-être qu’il n’est pas parfait (on s'est aperçu que quelques petits détails clochaient), construit un peu hâtivement. Oui, je sais, il y a quelques robinets qui fuient... Le tout pour deux piscines, une patinoire, un centre équestre, des salles de sports couvertes et chauffées en nombre, des terrains de football, de rugby, de volley, d’athlétisme... étendus sur plusieurs dizaines d'hectares, un centre médico-sportif, un foyer, une salle de conférences... Et, l'année prochaine, ce sont 600 internes que pourra  accueillir le centre. 

Ce centre-et j'insiste à l'intention de ceux qui trouvent que Font-Romeu nous a coûté trop cher (environ le prix de deux Mirage IV) restera pendant longtemps un modèle du genre, à la pointe de l'entraînement sportif. Car, cela ne fait aucun doute,  après les Jeux de Mexico qui ont mis en valeur des problèmes d'adaptation liés à l’altitude, les athlètes rechercheront toujours le bénéfice d'un entraînement rationnel, effectué au dessus de 1500 mètres, et qui leur permettra ainsi d'améliorer sensiblement leurs performances, dès leur retour en plaine, pourvu que la durée du séjour soit.. d'environ trois semaines.

J'allais oublier : c'est aussi une station de sports d'hiver, enneigée six mois sur douze, et que la plaquette du syndicat d'initiative présente, avec ses trois mille heures d'ensoleillement annuel, comme une capitale solaire. Pour en revenir à l’ensemble sportif et scolaire, Font-Romeu est un centre vivant d'une éducation sportive exemplaire où les objectifs éducatifs ont toute leur place. « Enfin, nous aurons en France des champions qui auront leur Bac » ambitionnent les responsables. Ainsi, les élèves suivent les mêmes horaires de cours que leurs amis de la plaine, seulement l'heure se compose astucieusement de 25 minutes de leçons proprement dites, le reste étant réparti entre une interrogation et le début du travail personnel. Pour le Ministère des Sports et celui de l’Éducation nationale, qui pour une fois font cause commune, avec l’ambition implicite de réussir ce que tout éducateur rêve : développer un corps sains dans un esprit sain ! »


- le Lycée climatique, 1967, le réfectoire -