Laïcité à l’école ; la descente aux enfers…

Catégorie Pieds dans le plat

Depuis 1989, les atteintes à la laïcité à l'école se sont démultipliées et laissent entrevoir le pire. Nous publions ici le texte de présentation de l’enquête Ifop/LICRA auprès des lycéens qui est un rappel historique. Nous remarquons qu’à aucun moment le nom d’une religion n’était cité. Pourtant toutes les religions suscitent-elle ce genre de problème ? Pour avoir peur d’appeler un chat un chat, on en arrive à faire le jeu des extrêmes. On notera que nous n’avons pas citer le nom d’un parti… N’est nullement évoqué la tragédie Samuel Paty. Pas question bien sûr de parler de sa « décapitation »… de peur sans doute de dramatiser cette incroyable action ou de déranger ceux qui en sont, à différents degrés, responsables ?


- collège de Conflans 2020 © Silanoc -


Rappel historique…

C’est en 1989, avec « l’affaire des foulards » de Creil, que la question de l’expression des religions dans l’espace scolaire s’est invitée pour la première fois dans les débats politiques. La manière dont elle est temporairement résolue par le ministre de l’époque, Lionel Jospin, n’est pas très glorieuse pour un pouvoir laïque et républicain : le recours discret à une autorité politique et religieuse étrangère, le roi du Maroc, pour faire pression sur les parents des collégiennes voilées. En 1994 son successeur, François Bayrou, prend davantage ses responsabilités en enjoignant par circulaire d’exclure les élèves qui refuseraient d’ôter leur voile. Mais cette circulaire repose sur une base juridique si faible, rappelée peu après par le Conseil d’État, qu’environ la moitié des exclusions est invalidée par les tribunaux administratifs, au grand dam des chefs d’établissement, ainsi déjugés et placés devant la difficulté d’apporter, au cas par cas, la preuve d’un comportement prosélyte ou d’un trouble à l’ordre public.

Jusqu’au vote en 2004 de la loi interdisant aux élèves de porter un signe ou une tenue exprimant de manière ostentatoire leur conviction religieuse, la question de l’affichage vestimentaire d’une religion à l’école a focalisé l’attention du public ; sans doute au détriment d’autres signes, tout aussi préoccupants, de la montée de l’influence de courants religieux intégristes chez une partie des élèves. En 2002, un ouvrage d’un collectif de professeurs, puis, deux ans plus tard, un rapport de l’Inspection générale de l’Éducation nationale, montrent que « la question du voile » est sans doute l’arbre cachant la forêt d’atteintes bien plus variées, au nom de la religion, à l’enseignement de certaines disciplines et aux règles de la vie scolaire.

Parmi elles, la montée d’un nouvel antisémitisme qui, dès les années 1990, pousse une partie des familles juives à changer d’établissement ou à quitter l’enseignement public, parfois à déménager voire à quitter la France. Ces alertes ont été largement ignorées par les autorités et même parfois dénigrées au nom de leur « absence de scientificité » ou encore de leur « caractère anecdotique ». Jusqu’aux attentats de janvier 2015 où l’opinion découvre que dans plusieurs centaines d’établissement les moments de recueillement ont été troublés par des élèves justifiant l’action ou prenant le parti des assassins. Le rapport de l’Inspection générale, qui relatait des faits semblables après les attentats de New York, Washington et Madrid, est alors exhumé par le Premier ministre Manuel Valls déclarant que rien ne semblait avoir changé depuis cette alerte.

En 2017, le dispositif de signalement des atteintes à la laïcité annoncé par Jean-Michel Blanquer dès son arrivée rue de Grenelle permet de valider cette variété des incidents, mais aussi de découvrir leur étendue sur le territoire, leur pénétration dans le Primaire et la diversité de leurs auteurs : élèves, parents et désormais personnels ; mais pas de mesurer précisément leur ampleur, car beaucoup d’enseignants ne signalent pas les faits qu’ils pensent avoir traité avec pertinence ou n’en signalent pas d’autres qu’ils n’ont pas su gérer ; enfin, il n’est pas besoin d’incidents pour que la laïcité soit malmenée : l’enquête de l’Ifop pour la Fondation Jean Jaurès révèle en effet que beaucoup d’enseignants s’autocensurent préventivement, simplement « par crainte d’incidents avec certains élèves ».