Alpes méditerranéennes : côté français...
En vedette, les villages de Saorge et Sospel.
Hier en Ligurie sur la Route de la cuisine blanche, entre oliviers, vignobles et patrimoine culturel, aujourd’hui de l’autre côté de la frontière mais dans la continuité d’une histoire partagée.
- Saorge, Alpes-Maritimes -
Après avoir de nouveau laissé les rivages surpeuplés de la Méditerranée, à partir de Vintimille, nous grimpons. Les terrasses d’oliviers se succèdent, une vraie mer bleue-verte et grise qui dessine des vagues agitées par le vent. Les vallées profondes où coulent des rivières dont le tracé n’est pas de tout repos, nous amènent à prendre de l’altitude. Nous traversons près d’Airole les premières vertèbres d’une épine dorsale qui culmine dans les Alpes-Maritimes vers 3000 mètres et passons sans la voir, la frontière entre l’Italie et la France pour redescendre vers Breil, longeons la rivière tumultueuse de la Roya avant de grimper les derniers lacets vers notre objectif en cul de sac, le village de Saorge, 450 habitants à l’année mais beaucoup plus en été.
Village typiquement médiéval, Saorge est une ancienne forteresse accrochée au flanc de la montagne. Autrefois défendue par trois châteaux, elle avait la réputation d’être imprenable. Sa situation géographique et ses maisons construites à la verticale lui donnent une allure de village tibétain, sans doute une des raisons qui lui ont permis de figurer parmi les plus beaux villages de France. Le site est sauvage et les randonneurs peuvent arpenter les montagnes voisines qui dépassent les 2 600 mètres. En attendant, une visite guidée dans un dédale de ruelles et de passages voûtés s’impose. On y découvrira au passage la Cathédrale et la place Saint Michel ainsi que la Chapelle Sainte-Croix des Pénitents Blancs, l’église Saint-Sauveur et son orgue italien classé. Le chemin les conduira immanquablement au monastère. Cet ancien Couvent des Franciscains fondé en 1633, classé monument historique, a été entièrement restauré pour devenir un lieu de retraite pour les artistes et un musée. Ces pensionnaires un peu spéciaux occupent chacun une cellule, celle-là même occupée autrefois par les moines. L’atmosphère est spartiate à souhait, propice à la réflexion et à la création, juste adoucie par une bibliothèque enrichie chaque année par les commandes des artistes eux-mêmes. Le jardin, avant tout potager, est très bien entretenu par des volontaires. Il rappelle que les anciens habitants vivaient quasiment en autarcie. Installé sur un terrain en planches, il est typique des jardins alpins et approvisionne ces nouveaux franciscains de l’art...
Nous reprenons la route pour nous rendre à Sospel. Une demi-heure suffira pour rejoindre ce bourg qui compte aujourd’hui 3500 habitants. Situé sur la Route du sel, à 20 km du littoral, il a joué un rôle important au Moyen-âge. Le pont fortifié à péage est la trace tangible de cette prospérité passée. Ayant fait le choix, lors du Grand schisme d’Occident, du pape avignonnais, son église devient du coup une... cathédrale. C’est dans celle-ci d’ailleurs que sont organisées en juillet plusieurs représentations des BaroQuiales, festival d’art baroque à la programmation ambitieuse (lire ici notre article). Pour ceux qui ne connaissent pas le village, ce sera l’occasion de se promener dans les ruelles souvent pavées de galets, de visiter la fontaine de 1788 place Saint-Nicolas, la chapelle Sainte-Croix, les nombreuses façades en trompe l’œil, les maisons romanes et gothiques. Des visites guidées sont organisées par l’Office de tourisme, 5 € par personne.
- Sospel, Alpes-Maritimes -
Situé à l’une des entrées du Parc national du Mercantour, croisement des chemins de Grandes randonnées, Sospel garde un certain dynamisme lié aux activités nature (pêche, parapente, équitation, excursions, escalade, VTT, sports d’eau vive...). On pourra aussi visiter à pied les fortifications du Mont Barbonnet, le fort Saint Roc et celui du Mont Agaisen, éléments d’une sorte de ligne de Maginot alpine chargée en l’occurrence de verrouiller la vallée durant la dernière guerre.
À l’issue de ce court séjour, comparer le versant italien avec le versant français est tentant. Pour ce qui nous a été donné de voir, le côté français est plus moderne, le côté italien est plus sauvage, protégé par des gens qui vivent et surtout produisent au pays. Question accueil et restauration, la balance penche, selon nous, en faveur de nos amis liguriens mais c’est sans doute parce que, la frontière passée, tout prend un parfum exotique...
Pour les deux voisins et néanmoins amis, l’enjeu « tourisme » est complémentaire, voire essentiel. Ils l’ont bien compris.