Le magazine Paris Côte d’Azur a fêté cette année sa 51ème année d’existence...

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un bilan en forme d'inventaire à la Prévert...

Né de la volonté et de l'imagination féconde de Fernand Dartigues, le premier numéro de Cannes-Festival paru en mai 1959 pour le Festival de Cannes. Un choix dicté par le fait, qu’à cette époque, la cité cannoise ne se réveillait de sa longue léthargie hivernale que pour le grand rendez-vous international du film. Nombre de Palaces de la Croisette fermaient alors pour un mois ou deux et tournaient au ralenti en attendant la saison estivale. Les choses ont progressivement changées et nous ne nous aventurerons pas aujourd’hui à qualifier cette évolution… Changements des mœurs et des usages, élargissements des créneaux touristiques, modifièrent la donne. Cannes n’était plus seulement la ville du Festival, cela conduisit le magazine à changer de nom pour devenir « Paris Côte d’Azur ».

La revue, longtemps bimensuelle et en noir et blanc, se fit une place au soleil et en quadrichromie sans pour autant avoir l’ambition de faire de l’ombre à Nice-Matin, à l’Espoir et aux hebdomadaires visant la manne des annonces légales. Le ton volontairement décalé de son rédacteur en chef plaçait cette publication en marge du journalisme traditionnel. De la poésie, des commentaires impertinents et généralistes sur tout et rien, des informations… pertinentes sur l’actualité cannoise artistique et touristique.

Les techniques allaient aussi changer. La linotypie et l’imprimerie à papa firent long feu. À la révolution Gutenberg succéda la révolution Bill Gates. La machine à écrire fut rangée au placard et remplacée par un PC à la prodigieuse… mémoire. Quand au bon vieux Rolleiflex, il fut remplacé par un appareil photographique numérique, léger et facile à mettre en œuvre. Ainsi PCA prit le virage Internet, abandonna la version papier pour basculer en 2004 sur le web. Entre temps, le fondateur du journal, Fernand Dartigues décédait en l’an 2000, laissant son fils Alain et sa belle-fille Louise aux commandes.

Nous avons voulu, à la veille de la nouvelle année nous rappeler de quelques unes des personnes qui ont, soit aidé le journal, soit encouragé, soit participé. Impossible de toutes les citer et nous nous excusons à l’avance des oublis dus à la mémoire plus aussi vive de notre ordinateur personnel, le cerveau.

Premier sans doute à encourager Fernand Dartigues dans cette aventure incertaine, le maire de l’époque, Bernard Cornu-Gentille. Il connaissait bien Fernand qui fut le rédacteur en chef de son journal de campagne pour les municipales. De cette période féconde, de solides amitiés se nouèrent avec Paul Graziani qui devait devenir président du Conseil général des Hauts de Seine et avec Danièle Mathieu qui travaillait pour l’hebdomadaire (aujourd’hui disparu), Cannes-Midi.

François André, le fondateur d’un empire de Casinos et d’Hôtels qu’il allait laisser en héritage à son neveu Lucien Barrière, fut parmi les premiers annonceurs et premiers supporters. Une tradition qui perdura avec Lucien et Martha Barrière. Parmi leurs collaborateurs, Patrick Chos et Martine Maurin devenue Giuliani, entretinrent des rapports privilégiés et furent des partenaires compréhensifs. Autre grand monsieur du monde de la finance et des casinos, Jean Robert Toutain, PDG du Palm Beach qui fut « tuer » par un contrôle fiscal sur mesure probablement diligenté par Valéry Giscard d’Estaing, dont le frère, Olivier, un instant député cannois, vit en lui un concurrent sérieux. Il aurait pu être une chance pour la ville. Fernand Dartigues fut parmi ses proches. Il se laissa convaincre par cet homme de goût et de culture, aimé de ses employés, d’ajouter un ambitieux « international » au titre du magazine.

Beau fixe aussi pendant la période durant laquelle Michel Mouillot fut aux affaires. Fernand fut de ceux qui, surpris par son départ prématuré à la tête de la mairie, lui conservèrent de l’estime. Sur la Croisette, près du Martinez, les parents de Michèle et de Philippe Tabarot tenaient une plage, le Macumba. Là aussi, PCA était bien accueilli. Tout comme chez La mère Besson, le restaurant provençal ouvert en… 1959. Fondé par les Besson, une famille niçoise, l’établissement est actuellement tenu par Yves Martin et sa femme Margareth. Un inconditionnel du journal y opéra longtemps, Georges Calafatto.

Toujours dans le domaine de la restauration et de l’hôtellerie, Roger Vergé, Jacques Chibois, puis plus tard Bruno Oger furent des supporters de Fernand et partagèrent avec lui davantage que des bons plats : des idées… Dans la même veine, Fernand suivit le parcours de Richard Duvauchelle, de son passage au Montfleury jusqu’à Paris au Nova Park et à Bruxelles avant de le retrouver à Cannes. Quant à Patrick Scicard rencontré au Martinez et qui prendra la tête de Lenôtre, là aussi le courant passa entre les deux hommes venus d’un milieu populaire.


- avec le peintre Frandsen de Schomberg, à Valbonne -


Côté « monde de la nuit », la grande rencontre fut celle de Paul Pacini. Le créateur un peu vite oublié de tous les Whishy à Gogo du monde et du concept de la discothèque fit parti des amis. Avec lui, il inventa quelques slogans décapants. Une amitié prolongée par la présence de sa compagne Helen. Les amis de mes amis sont mes amis. Paul et Fernand en avaient au moins deux en commun, l’écrivain Pierre Rey et la journaliste Djami Chêne. Grand reporter, grand journaliste, grand directeur de publication, grand tout… court, le prolixe Jean Diwo (96 ans…) et sa femme la journaliste Jacqueline Michel, furent des familiers.

Pot-pouri de relations privilégiées qui viennent en mémoire : Frédéric Ballester, artiste, expert, conservateur apprécié ; plusieurs générations de Traverso dont les photos étaient aussi indispensables aux illustrations du magazine que la plume alerte de son rédacteur principal ; aussi les photographes Alfieri du square Mérimée&nbsp et Cathy Berg ; le fondateur de la Revue Internationale de criminologie, le genevois Carlo Moretti (Fernand en fut le directeur pour la France) ; les clients devenu amis comme M. Borhu directeur de la Swissair, Dieter Friedrich, représentant de la Pan Am, deux grandes compagnies aériennes tuées par la mondialisation. La Bégum Aga Khan lui manifesta son attachement en s’abonnant au magazine jusqu’à sa disparition en 2000.

D’autres noms appellent à d’autres anecdotes et souvenirs : le docteur Raymond Sacquepée qui partageait au Ciné-Club de Cannes son intérêt pour le cinéma. Fernand Dartigues fut longtemps le correspondant de feu le quotidien genevois, « La Suisse », lors des festivals du film. Il pigea aussi pour l’hebdomadaire de référence « Arts ». Cela lui permit des rencontres précieuses, comme celles avec Buffet ou Picasso tandis que des liens plus étroits se tissaient avec Ozenfant, Carzou, le peintre officiel de la marine André Hambourg, Hilaire, Tavé, Vicari, Cambier, Duaiv, le Baron-peintre Frandsen de Schomberg installé à Valbonne…

Dans le désordre et sans que cela soit d’une quelconque façon dépréciatif, Camille Rayon, Cesare Felis, Serge Triverio, furent des soutiens sûrs et pérennes. Le très niçois Adrien Pasigli dit Gatto et Christian Farget de la Pizza du port, André Guillouard (cofondateur de la station de ski de l’Audibergue, en… 1959), Romanens et sa Grange aux Belles de la rue Notre-Dame, Pierre Fauroux, Christian et Jean-Pierre Nigoux, fidèles du Petit Carlton (à l'époque une institution tenue de mains de maître par Roger Constantin), M et Mme De Vrainville, Georges Cantagrill, le chef Mario d’Orio, le restaurateur Jacques Dupuy, Isabelle Forêt, le poète et son inséparable besace, Daniel Schimtt, Monsieur et Madame Rolland de la rue Meynadier, le bijoutier Siegl, André De Blausse, Madeleine et François Vals, Jacqueline CombesPierre Blanckert du Club House du port Pierre Canto, Jacqueline et Jean De Tremeuge du Montfleury, André Sonier, directeur du Carlton puis du Georges V à Paris. Côté professionnel, Bruno Lecoq fit ses débuts rue Auber avant de devenir rédacteur en chef d’autres médias puis de se lancer lui-même dans l’édition. Fernand entretint des rapports plus que cordiaux avec les journalistes Jean-Pierre Largillet, Philippe Tallois, Jean Philippe, Alain Demaret, Jacques Pugnaire, Brigitte Brunot, Patrick Flet, ces deux derniers collaborant actuellement à la version Internet du magazine. Quant à Claude Chauveau, il l’aida à prendre le virage des nouvelles techniques de la communication et de l’information tandis que Mauricia Bertaud gérait au mieux la comptabilité et que le caricaturiste Kristian y laissait quelques mines de crayon. Associons enfin la jeune rédactrice Solène Lanza, Remy Porentru, Geneviève Gastaldo et Vincent Lasserre qui donnèrent gentiment lorsque nécessaire, un coup de main.

À souligner aussi une reconnaissance improbable en provenance de la capitale. L’EPP (l’Echo et la Presse et de la Publicité) lui décerna de louangeuses Plumes d’argent et d’or pour des éditos « talentueux ou courageux » signés Effedé ou FD. L’occasion de conforter son ego et de côtoyer les grandes signatures, telles celles de Jean Daniel, René Barjavel, Jean Dutour et autres André Frossard, Jean D’Ormesson, Alain Peyrefitte...

Jean Giono, allongé au centre, Fernard Dartigues, en arrière, à droite, au Contadour
Premier de cordée dans les Calanques de Marseille


Comment oublier Jean Giono que Fernand rencontra durant la guerre et qu’il rejoignit au Contadour. Ils entretinrent une correspondance régulière, se revirent souvent, à Manosque, durant le procès Dominici et à Cannes lors du Festival du film en 1961 où Jean Giono fut président du jury… Comment donc oublier Gaston Rebuffat (venu finir prématurément sa vie à Cannes en 1985) et son photographe historique Gabriel Ollive, ou encore René Aillaud, dans les hommes de sa vie. Ces quatre mousquetaires furent parmi les premiers, membres du Club des excursionnistes marseillais, à grimper dans les Calanques, en espadrilles sur des parois pas encore pitonnées.

Les années d’après guerre, qu’on appela plus tard les trente glorieuses, ont vu défiler de nombreuses publications. Certaines ne durèrent que le temps d’ouvrir un bureau, y installer une secrétaire de préférence jolie, pour ne sortir au final que quelques numéros. Paris Côte d’Azur a eu au moins le mérite de persister, avec des hauts, c’était avant le règne de la Com, des agences de pub et des plans médias annuels… avec aussi des bas, les crises successives qui amenèrent de grands noms de la presse papier, surtout généraliste, à fermer boutique (que dire des petits).


Ainsi, le magazine est sûrement une des trois plus anciennes publications qui aient paru sans discontinuité dans le département des Alpes Maritimes. Fernand Dartigues s’en serait très certainement réjoui. Collé dorénavant devant son ordinateur à la mémoire vive infinie, il regarde de haut, avec humeur et humour, l’éternité s’égrener.