L’icône Ingrid Betancourt redore son image

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Catégorie Pieds dans le plat

à Montréal et à Québec…

Elle en avait bien besoin, car après l’avoir encensée, les médias et le public français l’avaient repoussée, choqués par son comportement et les critiques de ses codétenus. Un véritable désamour qui l’avait conduite à quitter la France, pays qui avait été pourtant son premier choix après sa libération. Destination New York et petit tour du monde, de Ressorts de luxe en palaces étoilés. Sa famille a de l’argent, pourquoi se priver d’un peu de confort après ces 7 années de privation et de luttes pour survivre…

C’est justement son attitude dans ces moments de crise qui lui est reprochée par les otages américains qui ont partagé son infortune et plus significatif et crédible par Clara Rojas. Sa directrice de campagne a fini par craquer et s’est ouvertement plainte de l’égoïsme et la froideur d’Ingrid. « Elle ne partageait rien avec nous et, comble de l’irrationnel, ce sont nos tortionnaires qui furent obligés de nous donner les choses séparément, pour qu'elle ne nous dépouille pas de tout. »

Plusieurs mois ont passé et Ingrid, très croyante, semble avoir mûri et prête à faire son mea-culpa. Elle a avoué, à l’occasion de son séjour québécois, avoir eu des relations difficiles avec certains de ses compagnons : « Je pense que beaucoup d’entre eux souffraient parce que j'avais peut-être une exposition et qu'ils se sentaient abandonnés. Entre otages, il y a beaucoup de cruauté aussi. »

Faute avouée à demi pardonnée. D’autant qu’Ingrid fait amende honorable : « J'ai aussi compris dans la jungle que pour changer le monde, il faut d'abord se changer soi-même. J'ai vu beaucoup de choses horribles, comme la haine, l'envie, l'égoïsme, la couardise. Je ne l'ai pas vu chez les autres. Je l'ai vu chez moi. » Elle admit, la voix brisée par l'émotion, la lutte pour obtenir le plus gros morceau de pain, la lutte pour obtenir un peu plus d'espace… que les autres. De là peut-être sa décision de mettre en veilleuse son ambition politique.

La position de sa mère, Yolanda Pulecio-Betancourt, qui accompagnait sa fille, fut beaucoup moins consensuelle et charitable, estimant que sa fille était victime de… jalousies.

Les polémiques qui entachèrent son retour à la liberté n’ont pas apparemment gêné les Québécois qui ont fait à Ingrid Betancourt un accueil V.I.P.. Mercredi dernier, à Québec, l'Assemblée nationale la distinguait lors d'une cérémonie protocolaire où le Premier ministre Jean Charest, salua son engagement pour la démocratie, les droits de la personne et la liberté d'expression.

Jeudi soir, elle recevait le Prix international du courage au féminin décernés par Reporters sans frontières et Radio-Canada. Il lui fut remis par le gouverneur général du Canada en personne, Michaëlle Jean, haïtienne naturalisée. Enfin, l’Université de Montréal lui attribua un doctorat honorifique en reconnaissance de sa lutte contre la violence et la corruption en Colombie. De nombreuses émissions de télévision et de radio lui furent consacrées et toutes lui rendirent hommage.

Laissons à Ingrid le mot de la fin et de la rédemption : « J'ai pu accepter de vivre en me disant qu’un jour, je sortirai et je serai un meilleur être humain. Je serai meilleure mère, meilleure fille, meilleure sœur, meilleure amie. Meilleure. »

  • lire notre article de mars 2008, ici -