Grasse : Les skieurs de l’Audiberge et de La Moulière partent en guerre,
ils veulent des canons pour faire tomber une neige devenue de plus en plus rare…
- la plaine de Caille, propice au ski de fond… lorsqu'il y a de la neige ; ici, en 1987, un excellent cru -
L’hiver est encore loin mais, gouverner c’est prévoir et ceux qui espèrent bien pratiquer leur sport favori sur les pentes de l’Audiberge, de l’Aups, de la Charbonnière, du Signal ou de la Moulière y pensent déjà et comptent sur les élus pour résoudre leur problème : celui du manque de neige. Chaque hiver, ils se posent la même question : y aura-il assez de neige pour couvrir les pistes de leur station préférée, à seulement une heure du littoral ? Y aura-t-il des canons à neige pour subvenir aux manques, car les statistiques de ces dernières années ne portent pas à l’optimisme ?
Il faut bien le dire, sans canons à neige, les saisons sont bien courtes et les investissements déjà engagés ne riment plus à rien s’il n’y a pas une continuité dans l’action. André Guillouard, un des fondateurs de la station créée en 1960, toujours attentif à son évolution, caricature à propos des sommes déjà dépensées : c’est comme si on construisait une piscine et qu’on n’y mettait pas d’eau !
Il n’est pas pour autant le dernier à avoir apprécié les efforts réalisés par les institutions, communes et Conseil général en tête. Il leur sait gré des travaux déjà faits, reprofilage des pistes, engazonnement, achat d’un engin de damage très performant, révision des équipements… Il ne manque plus que quelques canons, de ceux qui permettent maintenant de fabriquer de la neige par des températures autour de 2°, 3° au dessus de zéro. Il en faudrait 25 à 30 pour couvrir une zone suffisante. Pour la petite histoire, il faut savoir que les deux canons à neige existants ont déjà permis de prolonger l'accès des scolaires à la station de 15 à 25 jours, selon les années. Ces 20 canons supplémentaires représentent une paille comparés aux 75 canons de la station voisine de Gréolières les neiges, membre du même Syndicat mixte qui capte les 3/4 du budget commun avec ses 27 km de pistes alpines alors qu’Andon-Caille se contente du reliquat, avec pourtant 22 km…
Il constate ainsi que si à Gréolières les neiges « c’est tout bon », sur Andon et Caille, rien n’est gagné. C’est pour cette raison principale que circule une lettre à l’attention de la député, Michèle Tabarot, des maires de Caille et d’Andon ainsi que du Conseiller général du canton de Saint Auban. Elle est destinée à appuyer les élus dans leurs démarches. Plusieurs centaines de skieurs du dimanche et de résidents des communes voisines, ont déjà signé.
Certains écologistes s’inquiètent eux pour la raison inverse. Le réchauffement climatique est une évidence, les glaciers reculent, ne faut-il pas changer son fusil d’épaules, miser sur d’autres activités plutôt que de s’entêter à faire pousser de la neige, là où elle tombe de moins en moins ? Et de poser une autre question : quel en est le coût énergétique ? La construction de réserves collinaires, quasiment indispensables pour alimenter en eau… froide les canons, est programmée. Cela répondrait en partie aux soucis des environnementalistes. Reste que la question est judicieuse et le choix des élus cornélien. Faut-il tourner la page de l’or blanc ou tout mettre en œuvre pour sauver ici une industrie fragilisée ? Les pétitionnaires demandent aux élus de faire preuve de cohérence. « Vous avez déjà fait beaucoup d’efforts financiers, disent-ils, il faut donc persévérer pour que ces derniers n’aient pas été faits en vain ».
-
Qui lo sa ? Paul Pacini, le fondateur des
Whisky à Gogo
, dont celui de Cannes fut un des plus célèbres, et inventeur – entre autres - du concept de discothèque, fut très probablement le premier à installer des canons à neige en France. C’était à Paris, dans les années 60. Paul avait invité, comme il le faisait chaque année, les cent personnalités les plus en vue : rendez-vous chez moi, à minuit, il neigera. Ce qui était un pari osé dans la mesure où la météo ne prévoyait rien de tel. Pour être sûr de son affaire, il avait fait venir de la Floride de drôles d’appareils (ces fameux canons) capables de fabriquer suffisamment de neige pour recouvrir les orangeraies et les protéger ainsi du gel. Et ce Noël là, il neigeas sur un trottoir de Paris… au grand étonnement des bobos et des happy few de l’époque.