« Le dernier maillon de la chaîne ».
- contribution à la pensée globale -
Dans cette mise en perspective proposée par Georges Brémond, il y a un beau paradoxe. L’homme, vu comme le dernier maillon de la chaîne (en attendant quelque imprévisible mutation), est le centre de tout mais à oublier sa dépendance avec le substrat qui le fait vivre, il creuse sa tombe… Existe-t-il des solutions pour pallier à ce triste constat ? Pas sans tout remette à plat, le dossier démographie, le dossier énergie… et imaginer une forme de développement humain basée sur d’autres valeurs, proposer de nouveaux objectifs, oser envisager la « décroissance »… après avoir tout miser sur la croissance…
« Placer l’homme au centre de tout, c’est aussi le placer au-dessus de tout. Partant de l’homme d’abord, toutes les dérives sont possibles : mon pays d’abord, les Français d’abord, ma culture d’abord, ma famille d’abord et bien entendu, moi d’abord. Nous nous ancrons ainsi dans un sentiment d’identification qui nous sépare des autres et rétrécit notre horizon dans tous les sens du terme.
Notre centre semble toujours plus important que celui des autres. Mais en y regardant de plus près, nos problèmes personnels sont toujours liés aux problèmes des autres et par là aux situations sociales ou communautaires, qu’elles soient locales, régionales, nationales ou planétaires.
Nous sommes toujours prêts à réclamer nos “droits”, oubliant que si les droits de l’homme et du citoyen existent pour tous, ils existent avant tout pour les peuples les plus démunis, les peuples opprimés par les dictatures, les famines et les guerres, conséquences d’un monde compétitif énergivore gouverné par des puissances financières qui manipulent les ambitions politiques.
L’attitude revendicatrice, dans laquelle beaucoup s’enferment, occulte leurs responsabilités, laissant aux élus et aux chefs le soin de décider pour eux ; et ces “responsables” décident le plus souvent en fonction d’intérêts limités, sans tenir compte des répercussions sur l’environnement naturel et humain.
Que serait le partage des richesses sur une terre désolée, stérile, déboisée, aux sols empoisonnés par les engrais chimiques, les pesticides, les boues usées et les déchets nucléaires, avec des désordres climatiques en tout genre et des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes, causés par l’effet de serre, du au réchauffement de la planète provoqué par les activités humaines ?
L’homme a tendance à croire qu’il domine et doit dominer tout, mais il est le dernier maillon de la chaîne et en mettant trop l’accent sur son importance, il oublie vite qu’il dépend avant tout de l’état des lieux de la planète. On s’aperçoit que, malgré toute sa technologie, il n’est rien du tout face aux éléments déchaînés et aux conséquences de ses propres nuisances. Et tout çà, non pas à cause de son besoin de connaître et de chercher, mais à cause de sa convoitise, du toujours plus au détriment du toujours mieux, de l’avoir au détriment de l’être.
Si le progrès technique est nécessaire, l’idéologie humaniste affirme que le but de l’action politique est une plus juste répartition des richesses produites. Malgré son aspect humaniste, cet objectif réduit l’être humain à une entité économique : producteur-consommateur. Il réduit le progrès humain à la possession et à la consommation, exactement comme le préconise tout parti politique assujetti aux modèles de croissance et de compétition économique, ignorant la biodiversité et la qualité de vie, surestimant les apparences et le court-terme et créant des besoins inutiles.
Pris dans l’engrenage des besoins à satisfaire, des productions et emplois créés par ces besoins, il est très difficile de trouver une issue à ce problème.
Charles Perrault, économiste à l’université de Paris, écrit : “ Le système des combines en tous genres, de la compétition et du nationalisme nuit à la grande majorité des naïfs qui n’ont que leur bon sens pour les sauver, et encore… Le manque d’informations, le laxisme en tout genre, la vie artificielle liée à la consommation de produits inutiles et à la complexité du machinisme et de la technologie, séparent de plus en plus les spécialistes, théoriciens et praticiens, du citoyen lambda. De même que le fossé entre riches et pauvres s’agrandit constamment.”
Nous sommes en train de récolter et de payer actuellement le détournement des ressources terrestres, le détournement de la recherche scientifique au profit des multinationales, au profit des égoïsmes nationaux. Les multinationales ont voulu s’emparer du vivant en sélectionnant des semences génétiquement modifiées pour les rendre stériles et rendre les agriculteurs dépendant de leur commerce. Et que dire du cadeau empoisonné que nous léguons au générations futures, faute de prendre en compte sérieusement la question des déchets nucléaires.
Faut-il se rappeler ces paroles du Chef Indien Seattle, en réponse à la proposition d’achat des terres de sa Tribu par le gouvernement des Etats-Unis, en 1854 :
“… Chaque parcelle de cette terre est sacrée pour mon peuple. … Nous sommes une partie de la terre, et elle fait partie de nous… La terre n’appartient pas à l’homme; c’est l’homme qui appartient à la terre. Toutes les choses se tiennent, et tout ce qui arrive à la Terre, arrive aux fils de la Terre.”