Le bonus 2008 : les élus ont eu une année de plus que prévu

pour mettre en œuvre leur politique et tenir leurs promesses… électorales.

Il est plus facile d’être dans l’opposition et la critique que dans la majorité, à faire au quotidien de la realpolitik. Un fois élue ou réélue, l’équipe au pouvoir est en situation de gérer la ville et de tenir ses promesses électorales. Plus elle en a fait, de promesses, moins elle a de chances de les mener à bien, sur le relativement court terme d’un mandat.

Parce que les municipales tombaient en même temps que les présidentielles, il fut décidé de donner une année de « rab » aux maires et, dans la foulée, aux conseillers généraux. Une année ajoutée aux six autres pour inaugurer telle ou telle réalisation, pour couper quelques rubans tricolores de plus, accrocher de nouvelles médailles d’or ou d’argent sur les poitrines de récipiendaires réjouis de l’aubaine, serrer encore une fois les mains de tous les présidents et présidentes d’associations que compte la commune, participer à quelques conseils d’administration où « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil »… Une année de plus pour convaincre.

Une année de plus pour que les élus de l’opposition et les candidats désireux d’accéder à leur tour aux affaires de la Cité, aiguisent leurs couteaux et appliquent leurs stratégies déstabilisatrices. Une année de plus pour que les électeurs comparent, en toute objectivité, les promesses et les réalisations de leurs élus.

A Cannes, Michel Emeriau, dans son Canard déchaîné, a fait tout le travail, pour le compte de Jean Martinez, dont il est un des colistiers pour les municipales. Du pain béni pour les autres opposants (Philippe Tabarot, Philippe Buerch, Apolline Crapiz qui n'a pas attendu, Jean-Pierre Villon ou Claude Meyffret) qui peuvent y trouver, en détail, la liste des promesses non tenues. Qu’on ne s’attende pas à trouver ici les promesses tenues - on suppose qu’il y en a… Il faut pour cela visiter le site du maire et de ses lieutenants envoyés au combat des cantonales ; David Lisnard et Christophe Santelli-Estrany ou sur le blog du jeune Olivier Tazé, remercié de son travail il figure sur la liste de Bernard Brochand. Il ne manque pas de publier le palmarès du Figaro qui place le maire de Cannes à la 4ème place d’un classement des meilleurs maires de France… selon l’avis d’internautes.

Prenant comme base de travail la brochure pré-électorale du candidat Bernard Brochand, Michel Emeriau passe minutieusement en revue la liste des promesses et leur retard à l’allumage. Cet inventaire à la Prévert en est presque ennuyeux. On y retrouve pêle-mêle le dossier du Port Canto (la partie terrestre) qui aurait pu être résolu depuis longtemps, les protagonistes ne demandaient que ça, depuis le début… L’Observatoire de la Californie qui resurgit… opportunément dans la campagne de David Lisnard pour les cantonales après un silence de… 7 années ; la piscine olympique dont on vient de donner tout aussi opportunément le premier coup de pioche, à la veille des élections et qui est passée d’un budget de 9 millions d’€ à un probable 27 millions d’€ dont plusieurs sont déjà passés en frais d’études…

N’en jetez plus, la cour est pleine. Ces critiques n’ont pas l’air en tous les cas de gêner le maire et son équipe qui, il faut l’avouer, ne se sont jamais autant démenés que ces trois derniers mois. « La meilleure défense, c’est l’attaque ». Ainsi on les a vus partout, très sûrs d’eux, conquérants, répondants au coup par coup. Cela sans nul doute « paye », surtout si l’on en croit le sondage de Nice-Matin.

Que dire de plus sur cette manie de sonder ? Que c’est un instrument terrifiant d’information et de désinformation. « On fait dire aux chiffres ce qu’on veut » a coutume de dire le premier adjoint de Bernard Brochand, André Girone lorsqu’on critique son budget et les emprunts de la ville. Expert-comptable, il sait de quoi il parle. De même, on fait dire aux sondages ce qu’on veut : il suffit de poser la bonne question, au bon moment, à la bonne personne.

Il n’empêche, ils ont une influence qui s’est confirmée dans les pays qui l’utilisent. On gouverne maintenant à coups de projecteurs sur les intentions de vote, sur la cote des hommes et des femmes politiques. Un point en moins, un point en plus, il n’en faut pas plus parfois pour déstabiliser un adversaire… C’est devenu tellement important que la tentation est grande de manipuler chiffres et sondages à son avantage, sans parler de mettre la main sur les médias, à coup d’achats d’espaces publicitaires et d’aides plus ou moins déguisées…

Le candidat Brochand souhaitait « que les médias existants soient renforcés dans leur vocation d’information locale ». Il a préféré mettre tous ses œufs dans le même panier : c’est Nice-Matin qui a raflé la mise… Quid de Cannes Radio, de Cannes TV et d’autres médias locaux qui faisaient preuve d’un peu d’objectivité, écrasés par les magazines officiels de « communication » de la ville, distribués à grand frais et massivement ?

Vous disiez : une année de plus ? Ce n’est pas d’une année dont il est question ici, mais bien de six…

Alain Dartigues

- mention : www.pariscotedazur.fr – mars 2008 -
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