Le Dakar : une annulation qui réjouit…
plus d’un africain et plus d’un islamiste.
- t'as pas vu passer Dakar ?
Il y a sûrement des gens qui ne pleureront pas dans les chaumières à l’annonce de l’annulation du Dakar 2008 et qui souhaitent dans leurs vœux de Nouvel An que cette manifestation disparaisse.
Le Dakar, cette hérésie dans un monde qui brûle ses derniers barils de pétrole et qui n’a guère d’autres solutions que de faire redémarrer ses centrales nucléaires, avec tous les risques liés à leur utilisation. Hérésie d’une course folle qui n’a aucun sens et encore moins sur un continent dans la détresse, qui voit passer sous son nez ces chevaux bruyants. Lionel Luca, député de la nation, fervent défenseur de l’indépendance du Tibet, membre du club Rolex, voit dans cette annulation une grande victoire des islamistes. Est-ce vraiment là le problème ? Demain, le plus grand rallye-raid au monde ira dans d’autres déserts, souffler la poussière des pistes, au Chili ou ailleurs. Lionel Luca toujours, nous parle de cette course comme le symbole d'une modernité occidentale. Il regrette fort ce qui ressemble, pour lui, à une capitulation de notre civilisation… Sans doute aurait-il préféré un affrontement plus direct sur le thème très porteur : « touche pas à mon Dakar » ?
Si certains écologistes et humanitaires s’étaient inquiétés assez rapidement après sa création en 1979, des conséquences négatives du rallye, rien n’avait pu endiguer son attrait. Personnalités diverses et variées s’y bousculèrent. L’homme à la Harley, Johnny, le prince de l’écologie, Albert de Monaco … les skieurs Picard et Alphand, Philippe Monet – toujours à contre courant - en furent. Daniel Balavoine y laissa sa peau, accompagné par Thierry Sabine, le fondateur de l’épreuve. Michel Sardou, Claude Brasseur et Caroline de Monaco eurent, eux, davantage de chance. Cette année, le poids mouche, Brahim Asloum, devait participer… pour la gloire.
Pour être un homme, un vrai, il fallait l’avoir fait, prouver son goût pour l’aventure, éprouver sa capacité à affronter les dangers… Quid des cinquante morts accumulés sur les parcours dont huit enfants renversés par des concurrents ? Quid de ces traversées « à fond la caisse » dans ces pays où misère et guerres se côtoient sans cesse ? Pas le temps d’y penser. On est là pour le plaisir : c’est que du bonheur !
Cette année, ils auraient été 570 équipages, motos, camions, ou automobiles. Selon Renaud, cinq cent connards sur la ligne de départ. Une immense caravane, véritable Barnum de forains si l’on y ajoute tous les suiveurs et tous les journalistes de l’Equipe ou de Gala confondus. Pas besoin de nous faire un dessin, l’enjeu économique est évident. Il serait aussi culturel d’après Bernard Laporte, notre secrétaire d'Etat aux Sports. Il y alla de son petit couplet plein d’ovalitude : c'est vrai que le Dakar, ça fait partie du patrimoine français… africain aussi !
Les passionnés du Dakar, acteurs ou spectateurs, sont comme la plupart des chasseurs, des conducteurs de 4 X 4 de ville et des fumeurs, ils se foutent pas mal des autres. Parlez-leur d’écologie, ils vous parlent de liberté. Liberté ronflante de défoncer les dunes de Mauritanie (demain, ils iront en Amérique du Sud), de tirer sur les derniers rhinocéros, les derniers éléphants blancs, leur dernière… cigarette.
Seul le présent les intéresse, leur petit plaisir à satisfaire. Ils ont totalement oublié les principes de solidarité, de responsabilité, ils sont là pour jouir, insatiablement…
La liberté finit pourtant, là où commence celle des autres. Ce lieu commun ne leur fait pas peur. Ils appliquent cet adage à sens unique. Seule leur liberté compte, ils l’imposent aux autres, sans d’état d’âme.
Alain Dartigues
- mention : www.pariscotedazur.fr – janvier 2008 - - contact, abonnement, désinscription -