Festival de Cannes : "last call",

le jury connaît déjà la Palme d'or.

Les jeux sont faits. Quelques journalistes habiles, quelques membres du Festival proches du jury connaissent les résultats du vote. Gilles Jacob, gardien du temple, a pour mission de garder le secret le plus longtemps possible. Il s'agit maintenant de téléphoner aux heureux élus sans malgré tout leur dévoiler. Palme, Grand prix, meilleur scénario, prix du jury,…? Il faut s'assurer de leur présence, ce qui n'est pas toujours facile car certains ont déjà regagné leurs pénates ou sirotent du champagne dans une loge, à Monaco, pour le Grand prix de F1.

Y aura-t-il des sifflets ? Il en faut un peu, on ne peut pas plaire à tout le monde n'est-ce pas ! Des hourras, une salle en délire, qui offre au récipiendaire une standing ovation ? Le jury a toutes les cartes en mains. A-t-il cédé à de quelconque pressions, amicales ou plus politiques ? Que ne fait-on pas à "l'insu de son plein gré" ! Car tout ce petit monde se connaît et devra, un jour ou l'autre, se retrouver autour d'une caméra ou d'un bureau, signer des contrats, faire des affaires…

Déjà les stands se vident au Palais. Les plagistes regrettent déjà les factures salées et les gros chèques des festivaliers. Les palaces cannois ont engrangé 20 % de leurs recettes annuelles… tout va bien. Une fois encore, les projecteurs du monde entier se sont braqués généreusement sur la ville, promesses de retombées économiques. C'est ça qui est pour eux le plus important. Le vrai Palmarès c'est celui du tiroir caisse ! Un Festival est bon quand le tiroir caisse est bien rempli. Un Festival est bon quand le Marché du film va bien !

Y aura-t-il ce soir un autre Benini pour faire le pitre, une autre Sophie Marceau qui s'emmêlera les pinceaux, une Sylvie Béart qui nous parlera des sans papiers, de Sarkozy qui dérape, des intermittents du spectacle qui rament ou pourquoi pas de la police municipale de Cannes qui ne s'entend pas avec son maire ?

La ruche s'active. Les maquilleuses, les petites mains des grands couturiers s'affolent. Chopard ouvre ses coffres et prépare ses colliers, ses sautoirs, ses pendentifs. Les diamants brillent avant de parer les plus belles. Les tops sont rôdées à ce genre de rodéo, les débutantes rougissent de plaisir, anticipant la montée, les éclairs des photographes… Il est tellement important d'être là, au milieu de ce beau monde, même si ces trop courtes minutes de gloire portent en elle-mêmes toute leur fugacité. On aura des ampoules au pied, on sera mal placé, on transpirera sous les bras, mais quel plaisir irremplaçable, avec l'espoir de figurer en plan américain, de plein pied ou en fondu enchaîné… dans une des pages de Match, Voici, Gala ou autre Ici Paris…

- mention : www.pariscotedazur.fr - mai 2006 -