Nice-Matin dans le tourbillon des regroupements de presse :

le quotidien du sud-est rejoindrait Le Monde.

Catégorie Pieds dans le plat

Tout le monde en parle, bien que Nice-Matin, le premier concerné, soit d'une discrétion exemplaire. Le Monde pourrait prendre le contrôle du seul quotidien de la Côte d'Azur lu aussi bien par les viticulteurs du Var, les retraités des Alpes Maritimes que par les bergers corses. Les journalistes interrogés gardent l'impression d'être les derniers officiellement au parfum. D'ailleurs, il n'y a encore rien d'officiel. Il faut glaner les infos dans la lecture de Libération, du Point et de Sophianet.com, pour se faire une idée sur la question. Nul ne paraît savoir encore s'il s'agit d'un rachat, d'une fusion ou, plus probablement, d'un échange d'actions ?

Le Monde, longtemps la référence d'une France intelligente, crédible en matière d'information, capable d'une rare objectivité, reconnue internationalement, subit comme tous ses concurrents, la crise de la presse. Une crise qui touche particulièrement la presse d'information car l'information coûte chère. Il faut entretenir une équipe de journalistes, de correspondants, de grands reporters. Déjà, des coupes budgétaires sont venues restreindre un peu plus une information répétitive, désordonnée, qui se satisfait de peu, qui n'a plus beaucoup de temps, scoop oblige, pour vérifier ses sources et ne le trouve pas pour suivre les dossiers.

Depuis longtemps cette presse d'information ne fait plus de bénéfices. Mais qu'importe, elle attire malgré tout les convoitises. C'est qu'elle côtoie de très près les pouvoirs politiques et économiques, qu'elle est un vecteur de leur emprise sur le public. Christian Estrosi, bon prince, se laissait aller, lors de vœux à la presse régionale, à un : sans vous, nous ne serions rien !

Que dire du rôle des médias italiens dans la dynamique du pouvoir d'un Silvio Berlusconi, propriétaire des trois principales chaînes privées d’Italie ? Chez nous encore, Serge Dassault, élu de droite, contrôle Le Figaro, L’Express, L’Expansion et, peu ou prou, de nombreux journaux régionaux. A droite toujours, Arnaud Lagardère, ami des Chirac, premier éditeur de l'hexagone, possède La Provence, Nice-Matin, Paris-Match, Elle, Télé 7 jours, Pariscope et quelques autres.

Les pouvoirs économiques ne boudent pas les grands groupes de presse qui véhiculent des informations capables d'orienter le cours de la Bourse, capables aussi de faire du lobbying pour une cause ou une autre, capables de faire et de défaire les carrières d'hommes politiques dont les décisions changent les donnes du marché et la passation des contrats. Est-ce d'ailleurs un hasard si Dassault comme Lagardère ont pour principale activité la production d'armement militaire ? Pourtant, la guerre n'est-elle pas une chose bien trop grave pour la laisser à des hommes de presse et de médias !

Dans ce contexte, small n'est plus beautiful et les regroupements sont un "sauve qui peut" économique qui paraît inévitable. Les valeurs de la démocratie ont peu de chance de s'y épanouir. La pluralité des titres sera peut-être sauvegarder mais l'indépendance des rédactions, même si elles s'en défendent, y perdra en liberté d'expression et en liberté tout court.

- mention : www.pariscotedazur.fr - février 2006 -