Le secret de Christian Estrosi
ou plutôt, Christian Estrosi a-t-il un secret ? Car sa vitalité déconcerte, son omniprésence aussi, aurait-il le don d'ubiquité ?
- à l'époque des Grands prix moto -
Quelles sont les raisons qui rendent un homme plus énergique qu'un d'autre, plus déterminé ? La génétique sans doute, l'éducation aussi, à travers le milieu familial et l'école, joue son rôle, dans des proportions bien difficiles à évaluer. La pratique du sport peut être aussi un élément prépondérant. Pour Christian Estrosi, cela semble le cas. Son expérience de sportif de haut niveau lui a façonné des nerfs d'acier. Il a appris à gérer les succès comme à assimiler les défaites. Avant d'être un poulain dans l'écurie Médecin, il fut champion de moto - pas un sport des plus écolo - mais, comme tous les sports pratiqués à un bon niveau, il apprend la rigueur, développe le goût pour l'effort, la perfection du geste. Une expérience qui ne pouvait que lui être utile dans son parcours politique. Son goût de l'effort lui permet de tenir une cadence d'athlète. Les 35 heures, il doit les faire en deux jours. Car cet homme est partout, on le voit à Paris, en Province et tellement présent dans son département qu'on a l'impression qu'il ne le quitte jamais. Certains en viennent même à se demander s'il n'a pas le don d'ubiquité…
Ce débordement d'énergie impressionne le public, inspire le respect à ses adversaires - peut-être un peu de jalousie aussi - et galvanise son entourage et ses troupes. Il y a un côté séducteur dans le personnage. Il sait sourire, il sait écouter, il serre les mains en regardant les gens dans les yeux. Rare ! Cela ne peut manquer de produire des résultats. Les résultats, on les connaît : il a 28 ans quand il commence à grappiller les mandats électifs. Conseiller municipal à Nice, conseiller général, conseiller régional, député. Une retentissante nomination dans le gouvernement Villepin comme ministre délégué à l'Aménagement du territoire lui fait acquérir une stature nationale. Nomination qu'il doit, certes à ses qualités mais surtout à son amitié avec Nicolas Sarkozy qui en a fait un de ses plus fidèles lieutenants. Sa protection lui assurant même de ne pas avoir à quitter son poste de Président du Conseil général.
Christian Estrosi incarne l'homme politique nouveau. Il est fait du même bois que son mentor, Nicolas Sarkozy. On l'imagine prononçant la même phrase : je sens en moi cette force… Un homme nouveau ? On est loin du Bébé Médecin, un surnom qui lui colle encore à la peau et qui parfois l'irrite, même si c'est loin d'être un handicap pour nombre de niçois. Quoiqu'on dise sur Jacquo, ils lui ont gardé une fidélité indéfectible. Certains vont même jusqu'à rêver que Christian reprenne un jour le flambeau à la mairie de Nice. Attentif, appliqué, il a appris sur le tas, il s'appuit maintenant sur des professionnels. Il a su s'entourer d'une équipe performante et dévouée, des inconditionnels comme Eric Ciotti, son directeur de cabinet. Ceux qui le conseillent en communication sont parmi les meilleurs. Rien ne leur échappent et chaque occasion permet à leur patron de marquer des points, de fidéliser un public, un électorat.
Il est loin de faire ses 51 ans, c'est plutôt un avantage. Mieux vaut ressembler à Kennedy qu'à Nixon dans le cœur des électrices… Présent sur le terrain comme personne, capable de rassembler des foules (son show électoral de Nikaia a réuni 5 000 personnes dont une centaine de maires et tout un aréopage de corps constitués), il accumule aussi les petites attentions. Et surtout, il est le premier, le premier à vous envoyer ses vœux par la poste, par le courrier électronique, laissant un SMS à un panel de personnalités. Ce sont de petits détails qui font souvent la différence, qui imposent une image, qui contribuent à créer un personnage. Il le sait.
Christian Estrosi est lucide. La classe politique a beaucoup à faire pour changer l'image qu'elle a dans le public, parmi les journalistes aussi bien que dans le monde judiciaire. Fini la langue de bois, vive le parler vrai, direct, celui, il faut bien le dire, mis à la mode par Nicolas Sarkozy ! Le temps est révolu, affirme-t-il, où un ministre de l'Intérieur se permettait de dire que les promesses électorales n'engageaient que ceux qui les écoutaient.
Il compte sur les médias pour relayer ses messages pour imposer son image et il n'a pas peur d'affirmer, lors de ses vœux à la presse : sans vous, nous ne sommes rien. Il ajoute, un rien démago : il n'y a pas pour moi, de petits médias !
A droite, dans le département, on attendait depuis longtemps ce genre d'homme. Une star, qui fasse oublier la prestance d'un Médecin et le glamour d'un Mouillot. Les autres, quelques soient leurs qualités ou leurs défauts, en viennent à faire pâle figure. Difficile de le concurrencer, mieux vaut faire allégeance et rester dans son sillage.
Cette force qui émane de lui le pose déjà comme le parfait arbitre dans les difficiles négociations pré-électorales : qui aura la timbale, qui décrochera l'investiture ? Les échéances semblent pour le profane lointaines, pour l'initié, elle sont d'actualité !
- mention : www.pariscotedazur.fr - janvier 2006 – René Allain -