G20 : Cannes accouche d’une souris...

Le soufflé est retombé, il est temps de faire les comptes et de dresser un premier bilan.

Quel est le prix qu’a coûté la manifestation ? On avance le chiffre de vingt millions € (chiffre porté à 28 par la députée UMP Geneviève Colot, selon le journal Le Télégramme). Une estimation qui, à notre sens, est largement inférieure aux vrais chiffres. En ces temps d’austérité annoncée, personne n’a en effet envie de voir publier des chiffres démentiels, d’où la tentation de les minimiser. De toute façon, on va nous dire que c’est une paille par rapport aux milliards de dollars, de yens, de yuans et autres monnaies devenues virtuelles qui étaient et sont toujours en cause et en jeu. C’est même de l’argent de poche pour les grands argentiers qui gouvernent le monde et font croire que se sont les chefs de gouvernements et les dictateurs qui tiennent encore les rênes et décident.

Néanmoins on peut s’amuser à en mettre certains en perspective. Vingt millions pour deux jours de rencontres au sommet, ça fait cher la journée… Chaque heure passée à serrer des mains, poser pour les photos, répondre à quelques rares interviews, échanger des sourires de connivence, représenterait donc un peu plus de 416 000 €. Pour combien, 25 chefs d’État ? Soit 16 640 € à l’heure pour chacun. Pas vraiment donné au prix de la baguette de pain et du ticket de métro même s’il faut ôter les heures consacrées au dodo, pas plus de 4 à 5 heures tant le planning était chargé. Bien sûr, ils ont bossé, plus que prévu d’ailleurs avec l’arrivée inopinée de… George Papandréou, le premier ministre grec.

D’ailleurs, s’il pleuvait sur Cannes, il ne pleuvait pas à Athènes mais c’était pour mieux… pleurer l’enterrement d’une forme de démocratie idéalisée, une démocratie qui donnerait la parole au peuple… par voix de référendum, une démocratie… participative comme dirait l’autre !

- sur le parvis du Palais, un grand de ce monde - Photo © Guillaume -

Quant aux grandes décisions, il faudra attendre. La Croisette aurait-elle accouché d’une souris ? « Tout ça pour ça ! », entendait-on à droite comme à gauche ! Dix huit mois de préparations, un préfet dépêché à Nice rien que pour s’occuper du dossier, l’armée, la gendarmerie, la police, les CRS, les services de santé, les pompiers, les secouristes, des réservistes rappelés, les missiles sol-air installés sur la Croix des Gardes et sur le quai du Port Canto, la baignade interdite à Nice et à Cannes, la moitié de la ville vidée de sa clientèle habituelle… Voilà une liste de contraintes non limitative et bien loin d’être exhaustive qui peut apparaitre totalement disproportionnée. On pourra, avant d’entrefermer ce dossier de la gabegie et de l’excès, le nombre grotesque d’affiches et de fanions de toutes dimensions, plusieurs milliers qui souhaitaient la bienvenue de Mandelieu à Juan-les-Pins aux délégations. Ridiculissime le nombre de ces bannières sur la Croisette et devant les Palaces où des mâts supplémentaires avaient été installés de peur qu’entre deux séances, les chefs d’état ou plutôt leurs chauffeurs aient un trou de mémoire et oublient qu’ils ne sont pas à Toronto, New York ou Mexico mais à Cannes. On eut pu sur cette base faire appel à Christo pour emballer la ville sous réserve que sa prestation coûte moins cher, ce qui reste à prouver… il est vrai, que stressés, les chauffeurs et leurs passagers auraient pu un instant hésiter, étaient-ils vraiment à Cannes alors que sur les affiches pointaient la très parisienne Tour Effel…

Bien sûr, la manifestation ayant eu lieu à l’insu de notre plein gré, il convient de se réjouir qu’aucun attentat n’ait eu lieu. Tout était prêt, nous dit-on, pour parer les effets d’une éventuelle attaque nucléaire ou chimique. Merci petit Jésus, nous y avons échappé ! Se réjouir aussi que les hôtels aient fait le plein. Quant aux commerces cannois, c’est une autre histoire. La mairie avait conseillé aux boutiques de luxe de rester ouvertes, apparemment, elles n’ont guère eu de visites, sinon celles des membres des forces de l’ordre venues vérifier leurs badges… La faute à la crise et à cette maudite politique de rigueur sans doute !

L’image de Cannes a-t-elle été magnifiée pour autant par la couverture médiatique mondiale du G20 ? C’est à voir ! D’autant que les résultats de cette réunion au sommet n’ont pas donné lieu à des décisions qui resteront dans l’histoire et auxquelles le nom de Cannes aurait pu être… éternellement lié.

Il faudra s’y résoudre, Cannes, c’est avant tout le Festival du Film, deuxième plus grande manifestation au monde après les Jeux Olympiques, nous dit-on… Cannes, c’est la Côte d’Azur, le soleil, la plage, le lieu d’inspiration privilégié d’artistes géniaux … Et c’est déjà beaucoup !

Il n’empêche, pour beaucoup d’Américains y compris journalistes, Cannes était toujours aussi difficile à situer sur la carte du monde si l’on en croit la photo qui fait le buzz sur Internet. On y voit une carte explicative situant Cannes… sur la côte atlantique d’Espagne, près de l’anonyme ville de Valdes, à moins que ce ne soit la bien nommée commune de… Franco.

Alain Dartigues

  • P.S. : Les petits caprices de stars révélés par les journalistes de Nice-Matin. Grâce à eux on avait appris que bien des vedettes présentes durant le Festival de Cannes avaient des doléances obsessionnelles comme celle de l’acteur hystérique Eddy Murphy qui avait exigé que le Palace du Cap d’Antibes installe des toilettes neuves dans sa suite… Les grands de ce monde ont eux aussi leurs petites manies. Preuve en est, l’exigence d’Obama de pouvoir pratiquer le basket au cas où l’envie lui prendrait ou du président chinois, Hu Jintao, qui lui ne voulait pas arrêter de pratiquer le badminton durant le G20… Plus sérieusement, les délégations de confession musulmane avaient refusé que leurs chambres soient inspectées par les brigades cynophiles chargées de leur sécurisation, la gente canine étant considérée comme… impure.