Affaire Palmade. Comment seront indemnisées les victimes ?

Catégorie Les paradoxales

Alors que l’aspect pénal des suites de l’accident provoqué par Pierre Palmade occupe le devant de la scène et l’intérêt du public, la question de la future procédure indemnitaire mérite également qu’on s’y intéresse. Comment seront indemnisées les victimes ? Quelles seront les conséquences pour l’acteur ? Me Vincent Julé-Parade, avocat spécialiste en droit du dommage corporel apporte quelques précisions :


« L’indemnisation des victimes de l’accident sera régie par la Loi du 5 juillet 1985 dite Loi Badinter, relative à l’indemnisation des victimes d’accident de la circulation. Selon cette loi, c’est à l’assureur du véhicule responsable de l’indemnisation qu’il reviendra d’indemniser les victimes. Cependant, l’indemnisation du conducteur du véhicule percuté et celle des passagers ne suivront pas le même rythme. S’agissant des passagers, le droit à indemnisation est indiscutable et des provisions devront être rapidement versées, tandis que l’indemnisation du conducteur sera conditionnée par la preuve de l’absence de faute de conduite de sa part. Bien souvent, seul le procès-verbal d’accident qui met des mois à être achevé permet ceci. Durant ce temps, le sort de l’indemnisation de la victime conductrice reste en suspens et les assureurs en jouent pour gagner du temps…

Le conducteur ayant commis une faute exclusive et grave verra son droit à indemnisation totalement exclu, ce qui pourrait être le cas de Pierre Palmade. Il n’est pas non plus à l’abri d’un recours de l’assureur à hauteur des sommes qui seront versées aux victimes du fait de la conduite après usage de stupéfiants.

Le second temps sera celui de l’évaluation, sur le plan médical, des dommages découlant de l’accident. Chacune des victimes sera convoquée par un médecin expert missionné par l’assureur. Le piège est d’être seul lors de cette expertise. La victime ne comprend souvent pas que c’est le moment clé de son indemnisation. De plus, l’expertise ayant pour but de fixer les préjudices subis, la victime doit bénéficier d’une juste évaluation de chaque des composantes de ses lésions (orthopédiques, neurologiques en cas de traumatismes crânien, mais aussi psychologique).  La complexité de l’évaluation médicale rend indispensable l’assistance d’un médecin-conseil, indépendant des assureurs, qui aidera la victime à préparer son dossier et le défendra lors de l’expertise. Selon la nature des lésions, de la longueur des soins, de la rééducation, plusieurs expertises sont souvent nécessaires avant que puisse être constatée la consolidation de la victime, c’est-à-dire la stabilisation de son état et de ses séquelles. S’agissant du jeune enfant, grièvement blessé, cette consolidation ne pourra intervenir avant sa majorité, d’autant plus s’il présente un traumatisme crânien.

À l’évaluation médicale, de nombreuses questions vont s’ajouter : la question de l’aménagement du logement, du véhicule et aussi l’avenir professionnel, parfois compromis. La bonne indemnisation suppose une parfaite connaissance du droit du dommage corporel, d’où l’intérêt d’être assisté d’un avocat spécialiste en la matière.

L’ultime étape est celle de la fixation de l’indemnisation. On doit indemniser tout le préjudice, rien que le préjudice. L’indemnisation répondre à chaque situation personnelle. Or, systématiquement, les assureurs vont tenter de verser le moins possible. Contrairement aux idées reçues, il n’existe aucun barème officiel d’indemnisation, mais des référentiels certes largement utilisés pour l’indemnisation des préjudices moraux. Chaque poste de préjudices doit être chiffré, argumenté, discuté. En cas de désaccord, le recours à la justice est toujours possible.

La longueur de la procédure en indemnisation qui dure  plusieurs années, parfois une décennie. Ainsi, bien souvent, les victimes de la route ont le terrible sentiment d’être plusieurs victimes et quelque peu maltraitées. »


 Me Vincent Julé-Parade