A lire : Américan Rhapsodie
par l’auteur de Basic instinct…
Six ans déjà que cette brique de plus de 500 pages a paru chez Albin Michel. A la lire aujourd’hui, les pieds dans le sable et la tête sous le parasol, je m’étonne qu’elle n’ait pas fait davantage de bruit ni provoquer plus de colère de la part des a-mis en cause.
Son auteur, Jœ Eszterhas, est le sulfureux scénariste de Basic Instinct. Il paraît fort bien introduit dans le monde du show-biz et de la politique. Il fait parti de ces beautiful people, également à l’aise dans un dîner de bienfaisance à Hollywood, à 2000 dollars la place, qu’à une réunion électorale bon chic bon genre à Boston.
Il nous montre, avec une délectation jubilatoire, le monde, ce monde du paraître et du "quand dira-t-on", par le petit trou de la serrure, celui de la chambre à coucher, et - on en a la démonstration ici - la chambre à coucher n’est pas l’unique lieu pour effectuer sa gymnastique sexuelle.
Cette symphonie américaine passe en revue de grands noms et nous fait pénétrer dans leur intimité la plus obscène, la plus triviale. Pas question ici de discuter sur le bien fondé ou non de décisions politiques majeures. Les leaders de ce pays sont passés au crible de leurs petites faiblesses, de leur humanité la plus ordinaire. Nos Louis et quelques choses avaient leurs chaises percées, notre Mitterrand sa fille cachée… Qu’ils soient démocrates ou républicains, nos cousins d’outre-atlantique ont des besoins sexuels qui influencent souvent leurs décisions et risquent à tout moment de mettre en péril leur pouvoir. Ces choses là existent et sont banales en somme. Les écrire leur donnent beaucoup de force.
A partir de l’affaire Monica L., Jœ Eszterhas stigmatise les institutions et épingle leurs représentants et tantes. Nul n’y échappe et tous les noms sont là : Hillary, Bill évidemment, mais aussi Busch père et fils, les frères Kennedy, Richard Nixon et Pat, Reagan, Nancy et Sinatra, Bob Dole, Al Gore et Tipper… Nul détail ne nous ait épargnés. Les anecdotes les plus croustillantes, les conflits d’intérêts les plus sordides, les calculs les plus tordus, les pulsions les plus primaires…
Certains démissionnent tandis que d’autres s’accrochent à leurs mandats et à leurs pouvoirs excessifs, d’autres encore pensent au meurtre, d’autres poussent au suicide les plus sensibles et les plus faibles. On se croirait dans un de ces nombreux films d’action où tout tourne autour du pouvoir et de Washington. On se demande à tout propos où commence la fiction et si la réalité ne la dépasse pas.
Comment imaginer que le milliardaire américain du porno, Larry Flint, prenne publiquement fait et cause pour Bill Clinton et qu’il intervienne dans la procédure d’"impeachement" en promettant un million de dollars pour quiconque lui fournira des documents sur les agissements coupables de dirigeants du parti républicain. Et ça marche. Tant et si bien que, dès les premières révélations, les têtes tombent, les démissions de personnages importants s’ensuivent, tel le leader républicain Newt Gingrich qui avait, jusque là tout l’avenir devant lui et qui se voyait déjà briguant la plus haute investiture. Même le procureur Kenneth Starr est obligé de mettre beaucoup d’eau dans son vin. La déchéance du président ne sera finalement pas votée.
Ce genre de récit serait bien entendu impossible en France s’il y décrivait avec le même soin et les mêmes précisions les arcanes du pouvoir, nommant les acteurs par leurs noms. La loi chez nous ne le permet toujours pas.
Malgré le temps qui a passé, une lecture utile pour mieux comprendre le tracassin qui énerve chaque matin les acteurs les plus importants de la vie publique américaine, présents, morts ou enterrés.
- mention : www.pariscotedazur.fr - août 2007 – René Allain - - contact, abonnement, désinscrption -