Marseille : le regard coloré de René Seyssaud

sur la Provence...

Jusqu’au 18 novembre prochain l’exposition consacré à cet amoureux fou des couleurs provençales, se déroulera au Palais des Arts.


- Champ d’oliviers dans les Alpilles, vers 1942 © Jean Bernard -


La Fondation Regards de Provence rend hommage à l’artiste marseillais René Seyssaud (1867-1952) en lui consacrant une grande rétrospective. Peintre de paysages, des travaux des champs, de natures mortes et de marines, son œuvre illustre une ardente et puissante personnalité remarquée pour l'intensité de ses coloris, pour la sincérité de ses émotions et l'extrême force de sa vision de la nature. Plus de 80 peintures seront ainsi réunies. Cette 43ème exposition clôture la présence de « Regards de Provence » dans les salons du Palais des Arts, dont la programmation se poursuivra à partir de mi-janvier 2013 dans le nouveau musée, inauguré à l’occasion de l’année « Marseille Provence Capitale Européenne de la Culture ».


- Cap Canaille à Cassis, huile sur toile 65 x 81 cm, collection particulière © Aleksander Rabczuk -

Dans l'ampleur et la force de l'éblouissante explosion artistique du XXème siècle, contemporain des Fauves, aux côtés de personnalités grandioses comme Cézanne et Matisse, Seyssaud reste lui-même. Comme eux, il refuse d'échapper à la référence imitative ; il questionne la nature en découvreur ; il compose à partir de plans colorés, connaît un moment d'instinct pur et retourne à l'équilibre.

Peintre indépendant, d’une personnalité bien affirmée, il exprime son amour de la Provence par la hardiesse de sa facture, par le triomphe de la couleur ramenée à sa pureté, par son respect de la profondeur dans la construction de l’espace. Animé par un désir de modernité, il tourne le dos au naturalisme et cherche à se libérer de l'obsession impressionniste. Il débute à Paris, en 1892, au Salon des Artistes indépendants. En 1904,  il fait construire une maison atelier à Saint-Chamas, au bord l'étang de Berre, sans manquer de faire de longs séjours, chaque été, dans le Vaucluse.

Le peintre a une connaissance intime de la paysannerie, une classe sociale à laquelle il appartient, par ses racines et par les liens du mariage. Il porte un regard nostalgique sur un monde en train de disparaître. Le paysan de Seyssaud participe du ciel et de la terre. Il ne le traite pas comme un élément isolé mais l'intègre par le rythme, les lignes, la touche, dans un tout exprimant à la fois la matière, le mouvement, l'énergie.

Ses marines sont des paysages de mer où la terre est dominante. Les énergies de la nature sont terriblement évoquées par le peintre ivre de soleil et de couleur. Il s'éloigne des artifices des gris et des violets des impressionnistes. Avec Les Roches rouges à Agay, il ne craint pas d’étaler les rouges claironnants des pointes rocailleuses sur le bleu indigo de la Méditerranée, d'utiliser l'éloquence des tons exaltés.

De l'arrière pays vauclusien, Seyssaud porte en lui le goût géologique des rochers accidentés. La liberté et la franchise de la touche très travaillée s'associent à la rugosité du minéral. L'intensité et la richesse de la couleur accentuent le contact et l'opposition entre la terre et l'eau. La blancheur du calcaire de Cassis s'oppose au bleu vif de la Méditerranée, les rochers rouges aux arbres sombres. Ces relations de tons expriment une tension entre les deux éléments. Les flots sont vibrants, frangés d'écume, les ciels sont chavirés de nuages effilochés, les roches déchiquetées. Seyssaud dépasse une vision simplement naturaliste. Aucune anecdote, aucun détail, rien de joli, ni d'arrangé. Comme les vagues à l'assaut des rochers, il livre une bataille, celle de la modernité.

Ce qui est essentiel pour Seyssaud, ce qui est suffisant pour aboutir à un équilibre, rejetant l'anecdotique, le pittoresque, le sublime, c'est la couleur qui compose sous le grand soleil. Seyssaud est un coloriste qui a utilisé des couleurs violentes. La critique a souligné son exubérance. S'il transpose sa vision, s'il exagère le coloris, il le pousse au maximum, l'exagération ne va jamais jusqu'à l'outrance. Il reste toujours fidèle à la nature. 


- Les pointes rouges à Agay, vers 1902, huile sur toile 34 x 41 cm, collection particulière © Aleksander Rabczuk -

  • L’ouvrage « René Seyssaud - L’ivresse de la couleur, 1867-1952 », édité par l’Association Regards de Provence, reproduit les œuvres de l’exposition avec des textes de Claude Jeanne Bonnici Docteur en Histoire de l’art et spécialiste de l’œuvre de René Seyssaud et dont nous avons extraits plus haut quelques phrases. L’exposition se déroule jusqu’au 18 novembre - Palais des Arts - Place Carli - Cours Julien - ouvert tous les jours de 10 à 18 heures - Tarif normal : 5 € - Tarifs réduits : 4 € - 2,80 € - 2 €.