Gaspillage alimentaire : la loi est votée,

passons à son application...

Sur une planète moins encombrée, les gaspillages de toutes sortes (eau, électricité, nourriture…) passaient inaperçus. Aujourd'hui, elles sont indécentes. Il y a des millions de gens qui n'ont pas accès à l'eau potable, des millions qui ont faim tandis que la terre souffre d'être mal traitée entre autre par les pesticides, menacée par les lobbys, Monsanto entre autres. La loi destinée à lutter contre le gaspillage alimentaire va donc dans le bon sens. Reste à passer de la théorie à la pratique et c'est pas gagné !



France Nature Environnement se félicite elle aussi des avancées constatées mais s'inquiète :

« La lutte contre le gaspillage alimentaire se voit désormais intégrée dans le parcours scolaire et dans le cadre de la responsabilité sociétale des entreprises, ce qui est positif. Le texte validé prévoit par ailleurs pour les distributeurs une obligation de respect de la hiérarchie des modes de traitement des déchets alimentaires et une interdiction de destruction des invendus. Cependant, les règles de sécurité sanitaire qui sont à l’origine actuellement de la plupart des destructions restent en vigueur.

Enfin, les moyennes et grandes surfaces de plus de 400 m2 se voient obligées de conclure une convention de don avec une association caritative. Cette obligation ne répond pas à l’objectif de réduction du gaspillage alimentaire et ouvre la porte à de nombreuses interrogations auxquelles les décrets d’application devront répondre (logistique, régime de responsabilité, dispositif de suivi, etc.). Le risque de cette mesure est aussi de reporter la responsabilité de la grande distribution sur les associations qui pourraient être assimilées à des opérateurs de collecte voire de traitement des déchets.

Agriculteurs, l’industrie agro-alimentaire et la grande distribution doivent prendre leur responsabilité dans la lutte contre le gaspillage alimentaire

Le gaspillage alimentaire reste un enjeu qui implique l’ensemble des acteurs et le rôle à jouer par ceux qui interviennent en amont de la chaîne alimentaire ne doit pas être occulté. FNE réclame depuis plusieurs années déjà qu’un état des lieux du gaspillage alimentaire soit réalisé à toutes les étapes, par filière et par produit. Il faut savoir quels sont les principaux postes de gaspillage pour orienter des politiques publiques cohérentes et ciblées. 

Le don alimentaire ne peut pas quant à lui être considéré comme la panacée. La grande distribution doit avant tout prendre ses responsabilités pour réduire le gaspillage alimentaire en travaillant en coopération avec les producteurs et les industriels de l’agro-alimentaire. De nombreuses mesures peuvent être prises par les enseignes pour permettre de changer les pratiques et les procédures qui génèrent du gaspillage : réduction de la taille des linéaires, formation des personnels avec reconnaissance des savoir-faire nécessaires, allègement des normes de calibrage, promotions responsables sur les produits à DLC courte ou encore transformation des fruits et légumes abîmés en plats préparés. Le don alimentaire ne doit intervenir qu’en solution curative et doit pouvoir être évalué dans des conditions de transparence, selon des critères qualitatifs et non uniquement quantitatifs, comme c’est aujourd’hui le cas. FNE recommande que les procédures de désapprovisionnement soient systématisées et que le système de défiscalisation des dons soit conditionné aux efforts mesures entreprises pour réduire le gaspillage alimentaire. »

Pour Patrick Hervier, du réseau prévention et gestion des déchets « Le temps d’énoncer de grandes intentions est passé depuis longtemps. Nous ne pourrons atteindre l’objectif de 50 % de réduction du gaspillage qu’en sachant d’où l’on part et en définissant le rôle à jouer par chacun des acteurs de la chaîne. Il convient également d’être prudent à l’égard du détournement de l’alimentation humaine vers l’alimentation animale ou encore de la méthanisation : ce sont de fausses solutions qui risquent de marginaliser les efforts nécessaires de prévention ».