Denim : c’est du propre !

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Dis-moi ce que tu portes, je te dirais si tu es concerné par la santé de ceux qui ont délavé ton « jean ».

J’ai été l’autre jour à la chasse au « blue jean ». Je projetais d’acheter un pantalon, de marque ou pas, dans ce matériaux devenu si commun qu’il n’est plus seulement le symbole d’une Amérique envahissante, économiquement et politiquement triomphante. Combien fut mon étonnement de constater la difficulté de trouver un « jean », de coupe classique qui ne soit pas vieilli intentionnellement. La perspective d’acheter un pantalon, certes neuf, mais ayant l’aspect de celui qu’il aurait eu plusieurs années plus tard, ne possède à mes yeux aucun intérêt mais, ce n'est pas là le seul objet de mon observation et de ma réflexion.

Une information, capitale à mes yeux, avait pourtant circulé dans les médias. N’avais-je pas vu, il y a déjà un an ou deux, un reportage à la télé mettre l'accent sur ce procédé qui permet de donner à ces pantalons, cet aspect délavé mis à la mode ? Cela se passait en Turquie, qui, un jour ou l’autre, finira bien (ou mal) par entrer dans l’Europe… On y voyait des ouvriers travaillant sans protection dans des locaux vétustes, utilisant la technique du sablage qui consiste à propulser un jet de sable sur le tissu afin d’en retirer la pigmentation jusqu’à atteindre la trame et la dégrader volontairement. Le documentaire en profitait pour dénoncer les conséquences de ce traitement indigne de nos chers « jeans ». En effet, le sable a la particularité bien connue de contenir de la silice, silice qui provoque la… silicose, une maladie douloureuse et invalidante, à l’issue souvent fatale. Les chiffres donnés faisaient état de milliers d’ouvriers concernés et de dizaines de morts recensés.

Force est donc de constater que cette information et d’autres, relayées par la presse, n’ont pas porté leurs fruits. Les jeans délavés, immettables pour nombre de quidams comme moi, sont actuellement ceux qui, majoritairement, occupent les étagères de tous les magasins que j’ai visités. Un petit tour via Internet m’apprenait que les Belges qui ont par ailleurs un mal fou à constituer un gouvernement, ont lancé, le 18 février dernier « La Campagne Vêtements Propres ». Tout en attirant l’attention du public sur le problème sanitaire qui en découle, elle demandait aux marques de jeans et aux enseignes d'habillement, d'abolir immédiatement le recours à cette pratique meurtrière et de s'engager pour l'interdiction légale d'importer des vêtements sablés.

Cette campagne aura-t-elle plus de succès que celle qui interpellât les agences de mannequins et les plus grands couturiers de mode (Gagliano, Gaultier, Carl Lagerfeld, Armani…), pourvoyeurs de mannequins exsangues, leur demandant de modifier leurs standards de recrutement. De ne plus exiger de leurs modèles qu’ils soient à la limite de l’anorexie pour répondre à des critères arbitraires, le plus souvent incompatibles avec un état de santé physique et psychologique normaux ? Car, la vision des photos de ces mannequins publiées dans tous les magazines, de Marie-Claire à Paris Match en passant par Gala et Point de vue, est affligeante. On continue à y voir trop de grands échassiers qui promènent sur les podiums leur tristesse et leur mal être comme une carte de visite. Tout cela devant un florilège de peoples complaisants où l’on peut retrouver aussi bien de la gauche caviar, de la noblesse décadente comme des stars du music-hall et de la scène, gloires actuelles ou passées. Ainsi se retrouvent Julie Depardieu aux côtés de Frédéric Mitterrand, culture oblige. Charles et Camillia qui pourraient y rencontrer Albert et Charlene ; Emmanuelle Béart, de retour d’une intervention en faveur des SDF, croisant sans état d’âme Catherine Deneuve qui n’en a pas plus. Beaucoup y vont en famille (Demi Moore, Alain Delon, Jane Birkin…), pour conditionner les générations futures à ces spectacles. Ils ont tous un point commun, ils ne veulent pas voir la face cachée de cette pratique barbare. On achève bien les chevaux !