Arts : le « recolement » à l’ordre du jour...

Un rapport de la Cour des Comptes avait montré un manque de rigueur concernant l’inventaire des richesses des Musées de France.

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Catégorie Les Arts au soleil

Pour les non initiés, le terme récolement évoquerait plutôt une simple opération de recollage des morceaux. En fait, il s’agit de mettre à jour le patrimoine artistique conservé dans nos musées et de faire… coller les chiffres avec la réalité de l’existant, quitte à mettre en évidence des absences. Plus précisément, le récolement est « l’opération qui consiste à vérifier, sur pièce et sur place, à partir d’un bien ou de son numéro d’inventaire : la présence du bien dans les collections, sa localisation, l’état du bien, son marquage, la conformité de l’inscription à l’inventaire avec le bien ainsi que, le cas échéant, avec les différentes sources documentaires, archives, dossiers d’œuvres, catalogues .»

Le ministère de la Culture et de la Communication, vient de rendre public, par sa mise en ligne, le rapport d’activité pour 2010. Cela pour répondre aux souhaits de la Cours de Comptes. En effet, cette dernière avait pu constater de nombreuses insuffisances qui pouvaient laisser penser que des pièces avaient au fils des ans bien pu… s’égarer au point de devenir… invisibles. Ainsi on été contrôlés et répertoriés les dépôts d’œuvres effectués par les musées nationaux, le Centre national des arts plastiques, le Mobilier national et l'établissement de Sèvres-Cité de la céramique, au bénéfice des musées, des monuments historiques, des palais nationaux, des bâtiments administratifs, des assemblées parlementaires ou des représentations diplomatiques à l'étranger. Depuis mai 2007, le périmètre d'intervention de la commission a été élargi aux dépôts effectués par les ministères en charge des affaires étrangères, de la justice, de l'intérieur, de la défense, de l'économie et des finances, de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et par les musées relevant de ces ministères.

Les divers contrôles se sont avérés plus longs et difficiles que prévus en raison notamment de l'imperfection des anciens inventaires. Le nombre total des œuvres à récoler par ces institutions, qui était estimé à environ 305 000 en 2008, est passé à 435 000 en 2010. La commission chargée d’enquêter n’a pu que constater comme elle s’y attendait, la disparition de certaines œuvres précédemment recensées. L'insuffisance des informations disponibles l’a conduite à classer un nombre élevé de dossiers sans effacer pour autant la responsabilité des dépositaires.

On se rappelle à ce propos de plusieurs scandales qui ont défrayé l’actualité. À Nice par exemple, la municipalité de Jacques Peyrat (RPR ex FN), qui avait renvoyé brutalement l’ancien directeur des musées de la ville, Claude Fournet, s’était vue contrainte de pousser vers la sortie le nouveau directeur, Xavier Girard. Ce dernier était en effet mis en cause dans la disparition du violon de Matisse et de livres lui ayant appartenu. Sans compter le tapage lié à la disparition de deux tableaux de Monet et Sisley, dont l’ancien conservateur du Musée des beaux-arts, Jean Forneris, dut bien avouer le vol. Un audit commandé par la direction des Musées de France, avait pourtant recommandé un… « recolement ».

De nombreuses autres absences suspectes ont été dénoncées dans le livre d'Emmanuel Pierrat et Jean-Marie de Silguy, « Museum Connection, Enquête sur le pillage de nos musées », publié en 2008. Y sont dénoncés des employés de musées, des conservateurs, de voleurs… ordinaires qui profitent de graves lacunes concerant la protection des Musées français. Il y a aussi certains élus et membres de leur cabinet qui parfois empruntaient des objets divers (tableaux, sculptures, mobiliers…) et, en l’absence de répertorisation exhaustive, oubliaient de les rendre. Preuve s’il en ait qu’un sérieux travail de dépoussiérer de nos Musées et de leurs réserves, est plus que nécessaire avec comme préalable, ce fameux « recolement ». CQFDire !

Alain Dartigues