Le « gigot bitume » en danger d’extinction,

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une tradition propre au monde du BTP.

On connaissait le drapeau tricolore que l’on installe au faîte de la toiture d’une nouvelle construction, lorsqu’elle est hors d’eau. Peu ou prou celle du gigot bitume . Il est vrai que l’emploi du bitume pour étanchéifier un bâtiment a progressivement été abandonné, au profit de produits thermosoudables, plus faciles à utiliser mais pas forcément plus chers. L’architecte avait fait le choix de cette technique, nécessaire pour réaliser le collage de l’isolant thermique sur le béton.

Le bitume comme le goudron - le premier étant un sous-produit de la distillation du pétrole, l’autre de la houille - chauffé à 180°, s’étale facilement sur les surfaces planes et pénètre dans les moindres interstices, conférant à l’opération une efficacité quasi absolue. Ce jour là, l’étanchéité ayant été réalisée, les propriétaires, Agnés et François Moro, l’architecte, Pierre Fauroux, l’entrepreneur et chef cuistot, Pierre Capietto, avaient convié quelques amis, curieux de découvrir cette pratique propre au monde du BTP, sur le lieu même, situé sur la commune de Mouans-Sartoux.

Plus de 80 personnes avaient honoré ce rendez-vous… gastronomique autant que… culturel : des architectes, des entrepreneurs, des élus, des responsables administratifs, des enseignants, des artistes parmi lesquelles Jean-Paul Gomis, Christian Macé, Dominique Bourret, Isabelle Guerin-Nigoux, André Laurent, Michel Bensa, Dominique Thevenin, Max Charloven, Alain Calvy…

Les néophytes paraissaient un peu inquiets à l’idée d’un gigot cuit dans du bitume, du goût et de l’aspect qu’il pouvait ainsi prendre. Evidemment, une partie importante de l’opération consiste à protéger la viande du contact direct avec l’élément en fusion. Le gigot est pour cela soigneusement emmailloté dans plusieurs couches de papier et d’alu, lesté, le tout ficelé avec du fil de fer, avant d’être suspendu dans « la marmite ».

Après un certain temps, le temps nécessaire dirait l’adjudant de service, l’objet du délit se dévoila. Revêtu d’une gangue lisse et brillante, enfin déshabillé, le gigot, ou plutôt les gigots furent découpés de main de maître. Cuits dans leur jus, à température constante, ils s’avérèrent tendres à souhait.

Dans l’attente de cette gourmandise, l’assistance avait bien sûr fait sienne une autre tradition, celle de l’ « apéro du maçon » qui consiste à remplacer le Pastis par un verre de gros rouge qui tache. En l’occurrence, le Provence mis à disposition ne tachait point…

  • suite à notre article, une entreprise spécialisée dans le secteur du BTP, MG-Traiteur a tenu à faire savoir qu'elle proposait à sa clientèle le fameux "Gigot bitume", ce que nous avons vérifié en visitant son site. Dont acte !