La Turquie en Europe :

le risque d'une république islamique.

Catégorie Pieds dans le plat

Lors de la campagne pour les présidentielles, Ségolène Royal prit position en faveur de l'entrée de la Turquie en Europe, rejoignant sur ce point le souhait de Jacques Chirac. Nicolas Sarkozy s'était rangé dans le camp des opposants. C'est lui qui a maintenant la main sur ce sujet comme sur d'autres…

Les derniers événements vont plutôt dans son sens. Attentats, manifestations, cafouillis au plus haut niveau de l'Etat… Ils viennent confirmer ce qu'on savait déjà. La Turquie peut devenir, le plus démocratiquement du monde, un état islamique. Ce pays où l'islam est la religion majoritaire, a choisi depuis 1937 la laïcité et à ce titre pourrait rejoindre l'Union européenne. Jusqu'à présent, il a pu conserver ce système politique, grâce surtout aux interventions musclées des généraux au pouvoir, qui ont jugulé, chaque fois que nécessaire, les tentatives d'islamisation.

On le voit bien, ce pays est vulnérable et les affrontements violents qui ont eu lieu à propos de la laïcité versus un gouvernement aux mains des religieux, est loin de calmer l'inquiétude qu'on peut logiquement avoir. Du jour au lendemain, la Turquie peut basculer et devenir une république islamique. En soi, il n'y a rien de mal. C'est une affaire interne, une option qui appartient à ses habitants. D'autre part, l'Islam, en tant que religion, a autant de légitimité que toute autre religion.

Le problème ne se pose que par rapport aux autres états de l'Union européenne, à leurs institutions respectives en tout points compatibles, à la laïcité qui est leur liant. Il serait très difficile - bien qu'on conçoive qu'en théorie pas impossible - de s'associer avec un Etat qui donnerait la priorité à des lois basées sur des principes religieux soumis à des interprétations dramatiquement divergentes. L'exemple de l'Irak et de sa guerre de religion, n'est pas fait pour rassurer… la Turquie est, elle aussi, partagée entre sunnites et chiites…

La Turquie frappe depuis quelques années à la porte de l'Europe. En 1959, elle posait déjà sa candidature pour devenir membre associé de la CEE. Elle a calculé que c'était à son avantage. Avec ses 75 millions d'habitants et une histoire d'instabilités, de violences, de mauvaise entente avec son voisin grec, le problème kurde… elle pèserait fortement, voire excessivement, sur les destinées de l'Europe. Les risques de déstabiliser de fragiles équilibres seraient alors considérables.

La Turquie a fait de vrais efforts pour remplir les conditions nécessaires à son entrée. Mais, dans toute démocratie, ce qui a été fait peu être défait. L'exemple de certains états qui sont désormais membre de l'Union n'ont rien de rassurants. La Bulgarie avait, sous la pression, mis en prison plusieurs chefs connus de la mafia, condition sine qua non pour son entrée dans l'Union. Ils seront relâchés à peine quelques mois après que l'adhésion leur soit officiellement accordée…

En Israël, nombreux sont ceux qui préféreraient voir leur voisin définitivement rattaché au continent européen plutôt qu'à un Moyen Orient largement anti-sioniste… C'est pour eux un bon calcul. En effet les deux états entretiennent des rapports privilégiés. La Turquie qui a reconnu Israël dès 1949, la fournit en eau douce et des accords sur la défense et l’échange de haute technologie ont été signés en 1996. Mais où est l'intérêt direct de l'Europe dans tout ça ?

Sur ce dossier, la position de Nicolas Sarkozy semble être, pour, l'instant, la bonne. Rien ne garantit que la Turquie reste "un état républicain, nationaliste, populiste, étatiste, laïque et réformateur" tel que défini par Ataturk en 1937. Le principe de précaution voudrait qu'on se montre très réservé. La difficulté de travailler à 27 prouve, s'il en était besoin, que l'entrée de ce nouveau partenaire dans l'Union européenne n'arrangerait rien. Les membres historiques se posent de plus en plus de questions et les Français, est-il besoin de le rappeler, n'ont pas voté oui au dernier référendum sur le projet de Constitution….

Let's wait and see ! Attendons donc de voir !

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